Afrilight Energy veut accélérer la décarbonisation en Afrique. Interview de Ousmane COULIBALY Co-fondateur.
Ousmane COULIBALY est titulaire d’un Master Exécutif en Commerce International a l’ESCP Europe, ainsi qu’un Bachelor en Commerce avec Spécialisation finances à l’Université Concordia à Montréal.
Il débute sa carrière en tant que Conseiller en Investissement au sein de la Banque Scotia au Canada. Après quelques années d’expérience en Banque, il décide de retourner au Mali afin d’apporter sa petite contribution au développement de son pays natal. Il y crée la société FIMOCO SARL, un cabinet de conseil en stratégie et investissement qui accompagne plusieurs sociétés étrangères et locales à investir dans le secteur minier au Mali, notamment dans le secteur de l’or mais aussi du Nickel. M. COULIBALY sera également Directeur Pays de certaines multinationales comme Resolute Mining Limited (détentrice du projet de Syama au Mali), et d’autres sociétés d’exploration Australiennes comme Indiana Resources et Leopard Lithium. Plus récemment, avec son frère Sékou Tidiane Coulibaly, ils ont créé la société Afrilight Energy, spécialisée dans le développement de projets énergétiques en Afrique.
Qu’est ce qui a motivé la création de Afrilight Energy et quels sont ses domaines d’intervention ?
Au fur et à mesure que j’avançais dans la gestion de projets miniers, nous avons vite compris que le facteur énergie est une variable essentielle de la production, et que sa maitrise permettrait d’être plus efficient au niveau coûts et opérations, et l’intégration des énergies renouvelables réduit considérablement l’empreinte carbone des opérations minières.
Nous avons donc créé Afrilight Energy, qui dans un premier temps conseillait les sociétés dans leur stratégie d’intégration de l’énergie renouvelable dans leur mix énergétique, puis nous avons commencé le développement de nos propres projets énergétiques.
A ce jour, Afrilight Energy développe environ 100 MW de projets solaires en partenariat avec le Gouvernement du Mali. Nous sommes également actifs sur de nombreux projets dans les secteurs miniers et industriels.
En tant qu’acteur du secteur, quelle est votre appréciation globale de la politique énergétique du Mali, notamment dans le contexte géopolitique actuel ?
Le Mali a beaucoup de défis à relever et aujourd’hui le pays a opté pour une politique ambitieuse en faveur des énergies renouvelables et l’efficacité énergétique notamment par le développement de centrales solaires photovoltaïques, éoliennes et hydroélectriques. La première centrale solaire de 50MWc est en service depuis 2020 et plusieurs centrales hybrides totalisant plus de 10MWc de capacité solaire PV sont en cours exploitation.
A noter que selon le « Plan de Développement du sous-secteur de l’électricité sur la période 2022-2026 de la Société Energie du Mali », un programme d’investissement est prévu dans le secteur de l’Energie renouvelable, afin de réduire la dépendance aux énergies fossiles et garantir un mix énergétique économiquement viable et techniquement adapté au contexte malien.
Comment expliquez-vous que, malgré ses potentialités en ressources énergétiques, le Mali continue à importer de l’énergie, notamment de la Côte d’Ivoire, pour satisfaire les besoins nationaux ?
Le Mali évolue dans un contexte régional et international.
Ainsi la politique énergétique et les stratégies de mise en œuvre sont développées en cohérence avec les stratégies nationales de développement durable et changement climatique, ainsi que les stratégies de la CEDEAO en matière d’énergie renouvelable et d’efficacité énergétique.
L’importation de l’énergie depuis la Côte d’Ivoire s’inscrit dans le cadre de l’interconnexion sous régionale qui permet aux sociétés nationales d’électricité d’enlever les quantités d’énergie, disponibles dans les pays de la CEDEAO, au moindre coût.
Aussi, la réalisation des grands projets d’interconnexions électriques constitue des moyens idoines pour résorber le retard que les projets nationaux prennent pendant leur phase de développement (études techniques et économiques, études d’impacts environnementaux et sociaux, financement, construction et exploitation, …).
Dépendamment des projets, ces différentes étapes peuvent s’étaler sur plusieurs années.
Selon mes informations, les projets en cours de développement avancent très bien, et cela permet d’être optimiste par rapport à « l’indépendance énergétique », qui est un objectif, et une nécessité pour le Mali.
La presse nationale et internationale a récemment fait état de la découverte de plusieurs bassins de ressources énergétiques, notamment du gaz et de l’hydrogène naturel. Quelle peut être selon vous, la meilleure stratégie d’exploitation de ses ressources, afin de permettre aux maliens d’en tirer le plus grand bénéfice ?
En effet, au-delà des énergies renouvelables classiques que nous connaissons (énergie solaire, éolien, hydro et autres), depuis plusieurs années, il a été prouvé que le Mali contient des ressources d’hydrogène grâce aux travaux de la société Hydroma dans la zone de Bourakebougou.
En effet, cette société, pionnière mondiale dans ce secteur et dirigée par un Malien, a pu prouver l’existence de quantités importantes d’hydrogène naturel à travers de grandes campagnes de forage, et une unité pilote qui a produit de l’électricité pendant une dizaine d’années dans le village de Bourakebougou.
L’exploitation industrielle de ces ressources sera une aubaine pour le peuple Malien pour diverses raisons, notamment avec l’abondance de ressources énergétiques, la réduction du prix de vente de l’énergie, la réduction de l’empreinte Carbonne, et la fin de la dépendance par rapport aux énergies fossiles.
A terme, en plus de son indépendance énergétique, le Mali pourra également être exportateur de ces énergies vers les autres pays de la sous-région.
A quelles raisons, attribuez-vous le faible usage des énergies renouvelables dans le pays ?
Une des raisons dans le passé est que ce sont des équipements qui étaient assez coûteux mais depuis le début des années 2010 les coûts d’achat et d’installation ont fortement chuté.
Ainsi des projets éoliens, hydro ou solaire aujourd’hui coûtent cher, certes, mais beaucoup moins qu’en 2010, période où les centrales thermiques coûtaient moins chers.
Cependant avec la dynamique actuelle des politiques et des investissements dans ce secteur, nous sommes confiants que les énergies renouvelables seront bientôt les sources principales d’énergie au Mali.
Dernière question, quelles sont les ambitions que portent Afrilight pour le développement énergétique du Mali ?
La mission principale d Afrilight est d’accélérer la décarbonisation en Afrique. Nous continuerons à développer des projets dans ce secteur, et à convaincre et encourager les décideurs publics et privés de poursuivre leurs efforts afin d’augmenter et maximiser la part d’énergie renouvelable dans le mix énergétique.
Cela est une nécessite tant pour la sauvegarde de notre écologie et écosystème, que pour la réduction de nos coûts de production énergétique.
Afrilight continuera à investir et a fournir les efforts nécessaires pour contribuer à l’indépendance énergétique du Mali.
Entretien réalisé par A.S. TOURE
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