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Interview d’Ibrahima KOBAR Directeur Général Délégué OSTRUM ASSET MANAGEMENT

Ibrahima Kobar est actuaire de formation, diplômé de l’Institut de Statistiques de Paris (ISUP) et membre de l’Institut des Actuaires Français (IAF). Il est également titulaire d’un CFA (Chartered Financial Analyst). C’est en 1989 qu’Ibrahima Kobar débute sa carrière comme statisticien au service des études économiques bancaires et financières de la Société Générale. Deux ans plus tard, il rejoint la Midland Bank en qualité de gérant de taux. En 1994, il intègre Ixis Asset Management où il a en charge la gestion de portefeuilles assurance au sein du département de gestion obligataire avant d’en être directeur de la gestion obligataire et membre du comité exécutif. En 2010, il est nommé directeur de la gestion taux de Natixis Asset Management. En 2017, M. Kobar est nommé Directeur général délégué, directeur des gestions en charge des obligations et actions. Il répond aux questions du Magazine BUSINESS AFRICA sur les enjeux du récent partenariat entre Natixis, la maison mère de Ostrum et La Banque Postale. Il partage également son regard sur le développement du secteur de l’Asset Management en Afrique. INTERVIEW

Pouvez-vous nous faire une brève présentation de Ostrum AM dont vous êtes aujourd’hui Directeur délégué en charge de la gestion des taux ?

Ostrum Asset Management est le principal affilié de Natixis Investment Managers, le pôle de gestion d’actifs et de fortune de BPCE et de Natixis. Ostrum Asset Management, qui gère 271 milliards d’euros à fin juin 2020, propose une gamme étendue en gestion active obligataire et actions, ainsi que des solutions assurantielles sur mesure et des stratégies alternatives, répondant aux besoins des investisseurs dans le monde entier.

La presse a fait écho, il y’a quelques semaines, d’un partenariat important entre Natixis, la maison mère d’Ostrum et La Banque Populaire Asset Management (LBPAM), de quoi s’agit-il exactement ?

Le 28 juin 2020, Natixis et La Banque Postale ont signé l’accord de rapprochement de leurs activités de gestion de taux et assurantielle, marquant la création d’un leader européen, avec plus de 415 Mds € d’encours sous gestion pour le compte de grands clients institutionnels (à fin mai 2020). Suite à cette opération, Ostrum AM sera le neuvième acteur européen, en termes d’encours, sur le marché de la gestion institutionnelle. Notre ambition est d’en faire un leader, voire le leader de ce marché. Le nouvel ensemble proposera à ses clients une offre duale : la gestion d’actifs et la prestation de services pour permettre aux institutionnels et aux sociétés de gestion d’externaliser certaines fonctions telles que le middle-office, une partie de la gestion des risques, la conformité ou encore l’informatique.

Pourquoi ce rapprochement est-il scellé maintenant ?  Le contexte lié au Covid 19 a t’il été un élément déterminant ?

L’idée du rapprochement des activités de gestion de taux et assurantielle est antérieure à la situation sanitaire liée au covid19 puisque l’opération a été annoncée au début de l’été 2019. Le premier élément qui a, je pense, motivé les actionnaires est l’environnement des taux bas qui a largement impacté l’ensemble de l’industrie de la gestion d’actifs. Le second élément est cette pression formidable sur les coûts, liée notamment aux différents changements d’ordre réglementaire depuis la grande crise financière de 2008. Ces changements ont amené les asset managers à investir davantage dans certains services comme la conformité, et à produire de nombreux reporting exigés par le régulateur. On a donc d’un côté des coûts qui n’ont cessé d’augmenter et de l’autre une baisse des taux d’intérêt.

Pour résumer, le coût pour faire de la gestion d’actifs est devenu beaucoup plus cher dans un environnement de taux bas, d’où l’intérêt nos clients d’avoir une société de gestion de taille qui puisse répondre à leurs besoins d’externalisation de gestion ou de services liés à l’investissement. Je pense que la crise du covid19 n’a fait que conforter le choix des actionnaires de se rapprocher pour créer un acteur qui aura vocation à jouer un rôle de consolidateur sur le marché européen dans les prochaines années.

Quels avantages comparatifs cette nouvelle entité, classée au deuxième rang européen en termes d’actifs sous gestion, peut-elle se prévaloir ?

A travers cette nouvelle entité, en plus de la capacité de vendre nos produits habituels, nous apportons des solutions sur mesure à des clients qui cherchent des produits de plus en plus sophistiqués. Aujourd’hui les acteurs institutionnels mais aussi les particuliers sont à la recherche d’investissements durables et responsables, nous avons intégré dans notre offre, et cela depuis quelques temps, les critères environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance pour satisfaire ces demandes. Notre gamme de fonds ouverts sera d’ailleurs labellisée ISR. Mais tout cela n’aurait pas de sens si nous n’avions pas une large crédibilité, dans la gestion d’actifs, assise sur notre « track record » c’est à dire notre capacité, pendant plusieurs décennies, à « délivrer » de la performance à nos clients, en intégrant pleinement leurs contraintes et à être au rendez-vous de nos engagements.

Quelques mots sur le secteur de l’Asset Management en Afrique. Selon vous pourquoi cette activité tarde à véritablement décoller ?

A titre personnel, s’agissant de la gestion d’actifs en Afrique et plus particulièrement la zone UEMOA, je trouve qu’il y’a déjà un cadre intéressant qui est mis en place, avec le marché boursier de la BRVM, un cadre juridique avec l’OHADA ainsi qu’un cadre assuranciel avec le code CIMA.  On note également l’existence de quelques asset managers.
Ce que l’on peut relever, c’est que le secteur reste encore relativement étroit et dominé par le marché de la dette et essentiellement de la dette d’Etat.

A mon avis, il faudrait qu’il y ait du côté de l’offre un peu plus d’acteurs « corporate » c’est-à-dire des grandes entreprises qui viennent emprunter sur les marchés financiers. Autrement dit, il est nécessaire que les asset owners, par exemple les compagnies d’assurance ou les caisses de retraites, puissent davantage contribuer à financer les économies. Je pense que la demande va grandir grâce notamment à l’émergence d’une classe moyenne en recherche de produits d’épargne et de diversification des placements.

Aujourd’hui la seule possibilité de placer son épargne est d’investir dans l’immobilier. Il y a un vrai besoin de développer le marché des valeurs mobilières. Mais dans l’ensemble je reste toutefois confiant et optimiste sur le développement, à moyen terme, du secteur de l’Asset management sur le continent africain.

Propos recueillis par A. S. TOURE

©2020 Magazine BUSINESS AFRICA

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