ANALYSE

«La bonne définition du projet est la clé de voûte d’un PPP réussi» Ousmane DIAWARA, Partner – Infrastructure advisory, Project finance – EY

Existe-t-il un particularisme juridique en ce qui concerne les projets d’infrastructures ? Si oui lesquels ?

Bien entendu, il y a quand même un certain nombre de spécificités dans les projets d’infrastructures, souvent en lien avec un besoin initial exprimé par la puissance publique.
Il faut noter qu’il s’agit souvent de contrats et de structurations qui mêlent à la fois le droit public et le droit privé, car il y a des véhicules juridiques à mettre en place qui doivent respecter le droit des entreprises.
Par ailleurs, la notion de service public, impliquent des obligations qui sont plus importantes pour les opérateurs privés qui réalisent ces missions.

Quels sont les principaux enjeux selon qu’on est de la partie publique ou partie privée ?

L’intérêt pour la partie publique reste celui de vouloir offrir à ses populations des services publics de qualité. Cet élément ne doit, évidemment, pas se faire à n’importe quel prix.
Il convient donc d’analyser les différentes options, afin de recourir à la formule la plus pertinente.
L’autre enjeu pour la partie publique est que, quand bien même elle recourt au privé pour la réalisation de l’infrastructure, elle doit s’assurer que le service public délivré soit conforme aux exigences du contrat à un coût acceptable pour les usagers.
Pour la partie « Privé » les enjeux sont différents.
En premier lieu, il y a une notion de rentabilité car il s’agit bien de capitaux privés.
Le projet doit être structuré de telle manière que la rentabilité soit démontrée et qu’il offre de la prévisibilité à long terme sur les flux de trésorerie à percevoir.
Enfin, il faut noter que l’élément clé pour les opérateurs privés est d’avoir une juste répartition des risques entre les parties prenantes à savoir le public et le privé.

Quels sont les autres acteurs impliqués dans le développement d’un projet d’infrastructure et les principales problématiques associées ?

On a évoqué la partie publique, le partenaire privé ainsi que les usagers, mais il ne faut pas oublier que le projet doit être financé, autrement dit, il est quasiment tout le temps nécessaire de recourir à de l’emprunt pour boucler le financement.
Cela veut dire qu’il y a une quatrième catégorie d’acteurs qui intervient dans la chaîne, ce sont les prêteurs.
Les prêteurs veulent que soit sécurisé leur financement, en minimisant les risques d’incident de paiement. Ils sont donc très attentifs aux mécanismes de couverture des risques de défaut mis en place (ratio d’endettement, robustesse du plan d’affaires aux scénarios dégradés, priorité de paiement, instruments de liquidité, comptes séquestres, nantissement des actions, etc…) ainsi qu’aux conditions d’indemnisation en cas de résiliation anticipée des contrats.

Quelles sont d’après vous, les conditions de bonne réalisation d’un PPP ?

Les conditions de bonne réalisation d’un PPP dépendent, à mon sens, de trois éléments qui doivent être traitées de la manière la plus fine.
Premièrement, c’est la définition même du projet.
C’est la clé de voûte d’un PPP réussi.
Il requiert une compréhension fine et partagée des obligations de l’opérateur privé, c’est à dire le périmètre de sa mission, les limites de sa responsabilité, etc.
Deuxièmement, c’est le financement.
Il faut s’assurer, une fois que les missions sont définies, que les obligations contractuelles prévoient l’ensemble des cas et situations qui peuvent arriver, permettent de désintéresser les prêteurs. C’est à dire que dans la structuration des contrats, en cas de défaillance d’une des parties, les prêteurs seraient en capacité de recouvrer l’ensemble des sommes restant dues.
Troisièmement, puisque l’on ne peut pas exclure qu’il y ait des difficultés dans l’exécution du contrat, difficultés qui peuvent être dues des différences d’interprétation des clauses du contrat ou à des facteurs exogènes, crise du covid-19, guerre en Ukraine, il faut qu’il y ait les mécanismes appropriés pour gérer ces différends.
Cela peut d’abord passer par un règlement à l’amiable puis le recours à un arbitrage international.
Voilà pour moi les éléments clés sur lesquels l’attention doit être portée pour un PPP réussi.

Propos recueillis par A.C. DIALLO – ©Magazine BUSINESS AFRICA

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