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Interview Exclusive – Alhassane S. SISSOKO, Président de la SGI GLOBAL CAPITAL

Après avoir été manager de plusieurs établissements bancaires à travers le continent africain, Alhassane Salif SISSOKO fonde au Mali GLOBAL CAPITAL SA. Cette Société de Gestion et d’Intermédiation (SGI), dont il assure la présidence du Conseil d’Administration, a été agrée le 25 juin 2021 par le Conseil régional de l’épargne publique et des marchés financiers (CREPMF) de l’UEMOA. Pour le Magazine BUSINESS AFRICA, le banquier d’affaires, par ailleurs lauréat du « Prix Africain de Développement 2022 » catégorie « Prix Africain du Mérite et de l’Excellence », revient sur l’emprunt obligataire « Etat du Mali 6,20% 2022-2032 » dont GLOBAL CAPITAL a été co-chef de file et nous livre son appréciation du marché financier sous-régional.

GLOBAL CAPITAL SA, la SGI que vous présidez, a été co-chef de file de l’emprunt obligataire par appel public à l’épargne « Etat du Mali 6,20% 2022-2032 ». Quelle appréciation globale portez-vous sur cette opération ? Peut-on dire que l’objectif a été atteint ?

Au vu des évènements récents du Mali, la longue période d’isolement des autres pays de la sous-région, nous pouvons dire que cette opération un véritable succès, d’abord pour GLOBAL CAPITAL dont je suis le président, qui a bouclé à 100% sa prise ferme, pour le pool de SGI et, ensuite pour l’Etat du Mali qui confirme ainsi sa présence souhaitée sur le maché, par les investisseurs qui ont répondu massivement présent.

Pour de nombreux observateurs, cette émission obligataire marque le retour du Mali sur le marché international. Au regard des résultats obtenus, il semble que la crise que connaît le pays n’a pas dégradé la signature du gouvernement malien ? En tant que co-chef de fil de l’opération, confirmez-vous ce sentiment ?

L’embargo de la CEDEAO et de l’UEMOA sur le Mali pendant 7 mois n’a pas permis le remboursement des différentes échéances sur cette période. Cette situation a eu des impacts sur les ratios de la plupart des partenaires institutionnels. Toutefois, dès les premières heures de la levée des sanctions, le gouvernement de la transition a procédé au remboursement de toutes les échéances en capital, intérêts principal et intérêts moratoires, ce qui a permis de rétablir et de renforcer la confiance qui existait déjà entre le Mali et ses différents partenaires financiers. Être Allé avec succès sur le monétaire et le financier pour respectivement 270 milliards et 200 milliards dans la même période, juste après l’APE du Burkina faso est sans aucun doute le signe d’un retour du Mali sur le Marché.

L’émission obligataire par appel public à l’épargne demeure un mécanisme complexe même si elle est plébiscitée par les Etats. Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots le principe du financement obligataire ?

Le recours aux financements obligataires par les Etats, requiert l’autorisation préalable du régulateur et permet de mobiliser des ressources afin de financer les déficits budgétaires et ou des projets structurants, d’infrastructures de développements tels que les routes, les hôpitaux, centrales d’énergie etc… La mobilisation se fait par les membres du syndicat de placement sur une période précise à travers le marché primaire ou les titres sont émis pour la première fois. Les titres émis sont ensuite échangeables sur le marché secondaire après cotation sur la BRVM. L’opération est encadrée par l’instruction 063 du CREPMF.

Comment expliquez-vous que les entreprises soient moins enclines à recourir au marché obligataire pour financer leur développement ? S’agit-il de contraintes règlementaires ou de manque d’informations ?

Le manque d’engouement des entreprises à recourir au marché obligataire peut s’expliquer par un manque d’information (méconnaissance des instruments financiers), mais aussi par des contraintes règlementaires liées notamment aux conditions d’accès au marché qui restent strictes et basées sur des normes internationales. Il faut noter que la plupart des entreprises n’ont pas encore terminé leur processus d’ajustement à ces normes (l’information financière en général, niveau de fonds propres, équilibres financiers etc..) et, qui ont vocation à rassurer les investisseurs sur les risques qu’ils prennent cette catégorie d’émetteur.

Vous êtes Président de GLOBAL CAPITAL SA, une des plus récentes SGI de la zone UEMOA, vous avez également dirigé des établissements bancaires de référence à travers l’Afrique. Quel regard portez-vous sur le marché financier sous régional ? Est-il conforme aux attentes des investisseurs ou existe- t-il encore de choses à améliorer ?

L’amplitude des besoins de financement en Afrique en général, attire l’industrie financière, qui reste dominée par le secteur bancaire avec environ 70% des actifs du secteur. Notre marché financier manque d’abord de profondeur pour y jouer un plus grand rôle, avec seulement deux types d’instruments financiers que sont les actions et les obligations, ce qui limite le choix des investisseurs. Il manque ensuite de dynamisme dans son compartiment secondaire et enfin, reste très peu diversifié en risque géographique, avec près de 80% des sociétés cotées qui sont ivoiriennes.

Quelques mots sur les Fintech… ne pensez-vous pas que leur développement fulgurant en Afrique peut pousser les banques à revoir leur stratégie, au risque d’être distanciées, voire de disparaître ?

Il est clair qu’au vu des évolutions technologiques actuelles les banques doivent rapidement s’adapter, et elles l’ont compris en investissant dans le digital et en essayant d’être dans l’innovation dynamique. Les Fintech en Afrique a connu une croissance exponentielle ces dernières années grâce à plusieurs facteurs. Elles se sont en outre positionnées sur des produits financiers à forte valeur ajoutée et à faible règlementation. Quand on sait que l’essentiel des interactions entre banques et clients s’effectuent aujourd’hui via le numérique, tout au moins pour tout ce qui est opérations basiques, on peut se poser des questions, mais les clients veulent en réalité le meilleur des deux mondes, digital et physique et, ils continuent de préférer l’agence Pour les opérations plus sophistiquées. A titre personnel je pense qu’il y a un potentiel coopératif plus fort et des possibilités d’alliance stratégique qui profiteraient à tous.

Quelles sont, à moyen long terme, vos ambitions pour GLOBAL CAPITAL SA ?

Nous ambitionnons à court et moyen terme de (i) faire connaître le marché financier et ses avantages au citoyen malien qui n’a pas encore la culture boursière, (ii) contribuer au développement socio- économique de la zone par une participation active aux mobilisations de ressources (Nous remercions à ce titre les Etats de Côte d’ivoire et du Mali qui nous ont déjà fait confiance) et, (iii) à long terme nous voudrions nous positionner comme une véritable banque d’affaires, et contribuer à la révolution du secteur financier sous-régional en mettant à disposition des produits financiers innovants qui participent à l’inclusion financière des populations de l’union et à la diversification de leurs investissements. Nous avons déjà lancé notre « wallet directory » qui met en relation les offres et les demandes de titres sur le marché secondaire, sans se substituer aux canaux habituels de dénouements des opérations qui requièrent l’approbation en amont du régulateur.

Dernière question : Vous avez quitté le secteur bancaire pour le marché financier, quelles sont les raisons de ce choix ? Quel regard portez-vous aujourd’hui sur les activités de UBA Mali dont vous avez été Directeur Général ?

Cette question est la première qu’on me pose en général ; merci de me l’avoir posé à la fin (..). J’ai de l’admiration pour la vision du premier responsable du groupe Mr Elumelu. C’est purement par vocation entrepreneuriale que j’ai fait le choix de réorienter ma carrière, tout en restant dans un domaine en synergie avec mon expérience.  Nous avons érigé une fondation, construit des bases solides pour UBA Mali et, mis la banque dans une bonne perspective. J’ai laissé UBA Mali dans de très bonnes mains ; la nouvelle Directrice est compétente et engagée et les progrès enregistrés sous son leadership sont constants.

Propos recueillis par A.C. DIALLO

© Magazine BUSINESS AFRICA

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