Roland OUEDRAOGO fit des études de mathématiques à l’Université de Ouagadougou (où il décroche un diplôme de 3ème cycle) puis des études d’actuariat à l’Université Catholique de Louvain en Belgique où il obtint un Diplôme d’Etudes Spécialisées en Actuariat en juin 2001. Il rejoint le groupe Colina en septembre 2003 d’abord au Burkina Faso, comme Directeur Technique et Commercial puis, de mars 2010 à Septembre 2011, à Lomé, au sein de Colina Ré (compagnie de réassurance du groupe), comme Directeur Technique. Roland OUEFRAOGO fut Directeur Général de Colina puis Saham Burkina Faso (aujourd’hui SANLAM) de septembre 2011 à mars 2018. Au cours de son mandat, il a consolidé les acquis techniques et commerciaux de la société et l’a propulsée au 2ème rang des compagnies du marché. Aujourd’hui, SANLAM Assurance Burkina est leader du marché des Assurances au Burkina Faso. Parallèlement à ses fonctions dans la filiale non vie de SANLAM au Burkina, M. OUEDRAOGO a lancé et dirigé SANLAM Assurance Vie (anciennement Saham Vie) Burkina Faso d’août 2016 à Septembre 2018 et MCI-CARE Burkina Faso (filiale de Gestion Santé) de janvier 2015 à mars 2018. Le 1er octobre 2018, il est nommé Directeur Général de SANLAM Assurance Côte d’Ivoire (anciennement Saham). Roland OUEDRAOGO est également administrateur dans plusieurs sociétés du groupe.
D’entrée de jeu, peut-on en savoir plus sur SANLAM Côte d’Ivoire, l’entreprise que vous dirigez ?
SANLAM Côte d’Ivoire est une compagnie d’assurance présente en Côte d’Ivoire depuis plus de 40 ans et dotée d’un capital de 5 Milliards de FCFA. Filiale depuis 2018 de SANLAM Pan Africa, leader panafricain de l’assurance avec plus de 100 ans d’expérience dans le domaine de l’assurance doublée d’une présence dans 33 pays du continent, la compagnie capitalise sur la dimension continentale de son actionnaire de référence pour se positionner en tant qu’acteur majeur de l’assurance en Côte d’Ivoire et dans la sous-région. En effet, dans un contexte de concurrence effrénée, la compagnie est le 1er assureur non vie ivoirien depuis une quinzaine d’années et se réjouit ainsi de la consolidation de son leadership tant sur le plan national que dans la zone CIMA (Afrique de l’Ouest et Centrale francophone) où elle tient aussi la première place des assureurs non vie depuis quelques années. SANLAM Assurance Côte d’Ivoire, c’est aujourd’hui 150 collaborateurs (commerciaux, techniciens chevronnés, équipes supports expérimentées…) ; 6 espaces (Bureaux directs) dont 2 à l’intérieur du pays (BOUAKE & SAN PEDRO) ; 65 agences générales réparties sur l’ensemble du territoire et 56 milliards de chiffre d’affaires en 2021 (leader et numéro 1 dans toutes les grandes branches d’assurances du marché ivoirien en Non Vie). SANLAM Assurance Côte d’Ivoire c’est aussi des produits et des services innovants que nous offrons aux clients particuliers et institutionnels ainsi que des plateformes digitales pour interagir avec l’écosystème (clients, distributeurs, prestataires).
En ce qui concerne nos services et produits, nous faisons bien sûr de l’Assistance automobile, où nous sommes les pionniers en Côte d’Ivoire. Nous avons Le garage agréé et le Check Auto Express qui sont des services d’indemnisation rapide ainsi que First Auto Link qui simplifie la prise en charge des sinistres et permet l’expertise à distance. SANLAM en Côte d’Ivoire c’est également notre compagnie sœur SANLAM Assurance Vie Côte d’Ivoire et la première société de gestion santé MCI-Care Côte d’Ivoire.
Quelles sont selon vous, les caractéristiques propres au métier d’assureur en Afrique ? Pensez-vous qu’il existe une spécificité africaine dans l’exercice de ce métier ?
Le contexte africain est certes différent avec nos particularités socio-économiques telles que l’importance du secteur informel, la faiblesse des revenus, l’expression (même si elle tend à s’amenuiser) de la solidarité en cas de coup dur, etc. … mais fondamentalement, nous avons les mêmes besoins de couverture en assurance pour être tout simplement plus résilients et moins sujets aux aléas. Le rôle de l’assureur reste le même à savoir collecter des primes pour faire face à des sinistres c’est-à-dire organiser une « solidarité » entre les personnes qu’il couvre. Je pense que le défi majeur pour les assureurs sous nos tropiques c’est de rendre l’assurance plus accessible au plus grand nombre et non pas seulement aux élites. Pour cela, nous devons faire preuve d’ingéniosité tant sur les offres de couverture, le système et les modes de distribution, que sur les services pour améliorer sensiblement le taux de pénétration de l’assurance en Afrique qui est aujourd’hui de moins de 1%. Cela passera sans doute par des offres simples, claires et transparentes et surtout par un service après-vente (traitement des sinistres) simple et rapide. En effet, le sérieux des assureurs dans leur ensemble dans le respect des engagements et notamment dans celui du paiement des sinistres va augmenter la confiance des populations et la propension à prendre des couvertures d’assurance. Sur notre marché ivoirien, nous avons tenu un forum sur les recours en assurance automobile en octobre dernier et nous avons pris la décision importante de changer de paradigme dans le traitement des sinistres automobiles. Dorénavant, si un assuré est déclaré non responsable dans un accident avec un véhicule tiers assuré chez un autre assureur, l’assureur du véhicule non responsable doit indemniser tout de suite son assuré avant de se retourner contre la compagnie qui doit prendre en charge les dommages.
On parle de l’avant et l’après COVID-19, serait-ce également le cas pour les assureurs africains ? Quels sont les défis auxquels seront confrontés les professionnels de l’assurance en Afrique et en Côte d’Ivoire plus particulièrement ?
La COVID-19 a eu un fort impact sur tous les secteurs d’activités y compris le secteur de l’assurance. Le premier défi réside dans l’urgence de la digitalisation de nos process et solutions. La crise sanitaire nous a obligé à maintenir une distanciation forcée avec les clients du fait du risque de propagation de la pandémie qui a nécessité le télétravail. Cette situation a confirmé le fait que la digitalisation n’est plus une option mais un impératif stratégique. Ce travail avait déjà commencé à SANLAM Assurance Côte d’Ivoire par la création d’une direction en charge de la transformation depuis 2019. La COVID-19 a accéléré notre transformation et nous sommes en mesure aujourd’hui d’offrir des produits et des services totalement dématérialisés et sans nécessité d’avoir un contact physique avec le client. Il est par exemple possible chez SANLAM de souscrire une assurance automobile ou une assurance voyage totalement en ligne (y compris le paiement de la prime) ou d’avoir un bon de prise en charge de son sinistre en ligne. Ces évolutions s’accompagnent pour nous-mêmes et pour nos clients de problématiques de sécurité des informations et des transactions (risque Cyber) et conséquemment de besoins nouveaux en couverture d’assurance.
S’agissant de la Côte d‘Ivoire, quelles sont les mesures et réponses apportées par les assureurs pour la couverture des pertes d’exploitation liées au Covid-19 ? La couverture du risque pandémique est-elle prévue dans les contrats d’assurance ?
La couverture perte d’exploitation n’est pas courante sur nos marchés notamment du fait qu’il faut pouvoir estimer correctement la marge brute de son exploitation car c’est cette dernière qui est assurée. De plus, nous accordions généralement avant COVID des pertes d’exploitation suite à un incendie ou à un bris de machine. Pourrions-nous en l’état actuel accorder des garanties pertes d’exploitation après des événements tels que des pandémies ? C’est probablement souhaitable mais cela supposerait que les primes collectées suffisent à indemniser des événements dont la particularité est de toucher à peu près tout le monde. Or, le postulat dans les assurances classiques est que les primes collectées sur la communauté ne servent à payer que des sinistres subis par un petit nombre. Cependant, des solutions existent avec notamment le concours des états et des collectes obligatoires de primes à grande échelle pour couvrir des événements catastrophiques et/ou de nature pandémiques. Nous sommes évidemment prêts à apporter notre contribution à des solutions à l’échelle nationale ou sous régionale. En tout état de cause, il convient de rappeler que le groupe SANLAM, à travers sa fondation, a contribué le vendredi 24 avril 2020 à hauteur de 50 millions de FCFA au Fonds de solidarité initié par le gouvernement ivoirien pour la lutte contre la pandémie de la Covid-19 et a fait beaucoup d’autres dons directs (par exemple un lit avec respirateur au SMIT). Je dois aussi rappeler que nous appliquons une réduction Covid-19 de 20% sur tous les contrats automobiles et habitations afin d’alléger les frais de souscription de nos clients.
Le développement de la Bancassurance tarde à être en Afrique francophone une réalité, avez-vous des explications à ce retard ?
La collaboration entre banquiers et assureurs doit effectivement pouvoir s’intensifier pour offrir des produits à nos clients communs. La petite expérience que j’ai, me conduit à penser que pour que la synergie fonctionne, les conventions de distribution de produits d’assurance avec les banques sont insuffisantes. Il faut aller au-delà pour que le parcours du client soit optimisé aussi bien lors de la vente que lors de la survenance d’un sinistre. Le produit d’assurance doit s’intégrer complètement dans l’univers et dans le process du banquier de sorte qu’il ne soit pas en dehors du travail quotidien et normal de ce dernier. Le jour où le gestionnaire de votre compte vous proposera aussi bien des produits de banque que d’assurance avec le même entrain, la même volonté de vendre parce que tout cela est intégré dans son système et dans ses objectifs de vente, ce jour-là, la bancassurance aura fait un « pas de géant » sous nos cieux.
Quels sont selon vous, les enjeux du digital dans le domaine des assurances ?
Les enjeux du digital sont énormes dans notre secteur…Je pense que le plus grand enjeu est in fine l’amélioration de l’expérience client. C’est ce dernier qui nous fait vivre et tout ce que nous faisons doit concourir à répondre à ses besoins et à lui donner satisfaction. Pour cela, nos solutions digitales doivent être innovantes, intuitives, simples, transparentes et surtout adaptées aux besoins réels des clients. Elles doivent permettre le multicanal. Par exemple, un client doit pouvoir commencer à souscrire sur internet et terminer sa souscription dans une agence ou vice-versa. Nous avons déjà des plateformes de ce type qui marchent à SANLAM Assurance Côte d’Ivoire. Nous devons proposer des services accessibles et connectés. Le client d’aujourd’hui peut vouloir souscrire un contrat ou avoir des informations à 3h du matin. Nous devons être capables de lui répondre par un « chatbot » par exemple… Le client d’aujourd’hui n’a pas forcément le temps pour aller voir un expert automobile. Nous devons pouvoir lui proposer une expertise à distance. Pour résumer, améliorer le parcours client et plus globalement l’expérience client nous conduit immanquablement à travailler sur notre efficacité opérationnelle et à valoriser la donnée (offres adaptées, détection d’anomalies, de fraudes…). Nous y travaillons à SANLAM Assurance Côte d’Ivoire avec une feuille de route à l’horizon 2025, et l‘utilisation des techniques les plus avancées « d’Intelligence Artificielle », de « Big Data » de « Blockchain » et autres.
Nous assistons en Afrique à des mouvements de regroupements ou de fusions de sociétés d’assurances, pensez-vous qu’il s’agit d’une tendance de fond ? quels peuvent être les conséquences de ses regroupements pour le secteur des assurances mais également pour le client ?
Ceci semble effectivement être une tendance de fond qui s’observe dans tout le système économique mondial. Tous ces mouvements affichent les intentions claires de tous les acteurs d’augmenter leurs parts de marché sur le continent. Ces alliances permettent aux plus petits de bénéficier de l’expertise ainsi que du rayonnement des plus grands auxquels ils s’unissent. Si nous prenons notre cas, Saham Finances (marocain) a racheté Colina (ivoirien) et a ensuite été racheté par SANLAM (sud-africain). Ceci a donné naissance à un groupe de services financiers panafricain (33 pays) à même d’offrir une gamme complète de produits à la clientèle des particuliers et des entreprises. La taille et le rayonnement international de SANLAM constituent des atouts stratégiques considérables pour le développement de notre portefeuille de clientèle ainsi que pour la consolidation de notre positionnement sur le marché des assurances. L’avantage pour le client est que ces fusions permettent aux compagnies d’assurances d’avoir une assise financière plus forte afin de tenir leurs engagements notamment dans les règlements des sinistres.
Propos recueillis par A.C. DIALLO
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