Baobab Asset Management est une société de gestion d’actifs indépendante, agréée par l’AMF-UEMOA et basée à Dakar. Lancée en 2023, elle propose des solutions d’investissement innovantes, performantes et accessibles, en adéquation avec les réalités économiques et financières du marché africain, à travers trois fonds complémentaires : le FCP BAM TRÉSOR, un fonds monétaire, principalement investi dans des obligations d’État à court terme. BAM WURUS, un fonds actions dédié aux marchés boursiers africains et BAM FI NATANGUE, un fonds de capital-investissement qui cible des PME stratégiques, notamment celles qui interviennent dans la chaîne de valeur des hydrocarbures au Sénégal. Le Magazine BUSINESS AFRICA s’est entretenu avec Yatma SAMB, Directeur Général de BAOBAB Asset Management, sur l’importance de la gestion d’actifs comme instrument de croissance économique en Afrique.
En quoi consiste le quotidien d’un Asset manager en Afrique ? Existe-t-il une spécificité africaine dans l’exercice de ce métier ?
Le métier d’Asset Manager en Afrique combine rigueur financière, compréhension fine des dynamiques locales, et innovation constante. Il faut composer avec des marchés encore peu profonds, une information financière parfois limitée, et un environnement règlementaire en évolution. La spécificité africaine réside dans la nécessité d’être proche du terrain, d’avoir une lecture fine des risques non financiers (politiques, opérationnels, réputationnels), et de bâtir des produits qui allient performance et impact. C’est un métier d’anticipation, de pédagogie et de conviction.
Selon vous, en quoi la gestion d’actifs peut-elle, pour les pays africains, être un véritable instrument de croissance économique ?
La gestion d’actifs joue un rôle fondamental dans la transformation économique des pays africains. Elle permet de mobiliser efficacement l’épargne locale, souvent sous-exploitée, pour la réorienter vers des projets productifs, qu’ils soient publics ou privés. C’est un outil puissant pour réduire le déficit structurel de financement auquel nos économies font face. En structurant des produits adaptés aux besoins des épargnants et des investisseurs institutionnels, les sociétés de gestion permettent de transformer l’épargne locale en capital productif. Cela crée un lien direct entre les ressources disponibles et les secteurs porteurs de croissance, comme les PME, les infrastructures ou encore l’innovation technologique. On observe d’ailleurs une montée en puissance du secteur, marquée par la multiplication des sociétés de gestion locales et un intérêt croissant de la part des grands groupes financiers internationaux pour les marchés africains. Cette dynamique est prometteuse : elle renforce la profondeur du marché, améliore l’accès au financement à long terme, et ouvre la voie à une croissance plus inclusive et durable sur le continent.
L’activité d’Asset Manager est relativement nouvelle en Afrique francophone. Que faut- il faire pour la promouvoir davantage ?
Il est nécessaire d’agir à plusieurs niveaux. D’abord, en renforçant l’éducation financière afin que le grand public comprenne mieux les bénéfices et le fonctionnement des OPCVM. Ensuite, en impliquant davantage les banques et compagnies d’assurance dans la distribution de ces produits, pour les rendre plus accessibles à une large clientèle. Enfin, il est essentiel de prouver par des résultats concrets que la gestion d’actifs peut conjuguer performance financière et contribution au développement économique.
L’insuffisance de produits de placements, en dehors de ceux émis par les États, n’est- elle pas le principal frein au dynamisme du secteur ?
Il est vrai que le manque de diversité des produits de placement constitue un frein important au développement de la gestion d’actifs. Aujourd’hui, les portefeuilles restent largement concentrés sur les titres publics, ce qui limite considérablement les opportunités de diversification pour les investisseurs. Pour répondre à cette problématique, il est essentiel de stimuler l’émergence d’un marché secondaire plus actif et, surtout, d’encourager la cotation d’un plus grand nombre de sociétés privées. La bourse ne doit pas être perçue uniquement comme un canal de financement, mais comme un outil stratégique de transformation économique. Elle permet aux entreprises d’améliorer leur gouvernance, de gagner en transparence, et surtout, de s’adosser à des ressources financières durables pour soutenir leur croissance. La cotation en bourse offre aux entreprises une exposition accrue, renforce leur crédibilité et facilite l’accès à des partenariats techniques et financiers, à la fois locaux et internationaux. Elle devient ainsi un véritable levier de rayonnement régional, voire continental, en inscrivant les entreprises dans une dynamique de compétitivité globale. Au-delà de leurs intérêts propres, ces entreprises cotées contribuent à l’approfondissement de nos marchés financiers, en élargissant l’offre d’investissement pour les gestionnaires d’actifs, les institutionnels et les épargnants. Certaines initiatives récentes, comme la création d’un marché des matières premières en Côte d’Ivoire, montrent clairement que les marchés boursiers africains peuvent innover dès lors qu’un cadre réglementaire approprié est mis en place. Il serait désormais judicieux d’harmoniser les législations entre pays africains, notamment en ce qui concerne les transactions en devises. Cela permettrait de faciliter l’interconnexion des places boursières régionales et d’accélérer la construction d’un véritable marché financier continental, intégré et compétitif.
Quel est votre sentiment sur la façon dont la gestion d’actifs est régulée dans la zone UEMOA ? Les dispositifs d’encadrement juridique et règlementaire du secteur vous semblent-ils adaptés ?
La zone UEMOA bénéficie d’un cadre réglementaire solide, piloté par l’AMF-UEMOA, qui assure une supervision rigoureuse du secteur. Cette régulation garantit à la fois la sécurité des investisseurs et la transparence dans la gestion des actifs. Les Fonds Communs de Placement (FCP), par exemple, sont soumis à des contrôles stricts et à des audits réguliers, notamment de manière trimestrielle. Cependant, pour accompagner l’évolution rapide des marchés et encourager l’innovation, certains dispositifs gagneraient à être modernisés. La digitalisation, notamment, reste un levier essentiel encore sous-exploité. Enfin, il est essentiel de continuer à renforcer le dialogue entre les régulateurs et les acteurs privés afin d’ajuster les textes aux réalités économiques locales et régionales. Une approche plus collaborative permettra de bâtir un environnement réglementaire à la fois sécurisé, dynamique et propice à l’innovation.
Propos recueillis par A.C. DIALLO – ©Magazine BUSINESS AFRICA
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