Jibril Afolabi Maxime BOURAIMA est un dirigeant expérimenté dans le domaine de la finance d’entreprise et du management, particulièrement dans les services financiers et le secteur des télécommunications en Afrique. Basé à Cotonou, au Bénin, il occupe actuellement le poste de Directeur Général de Saphir Asset Management SA, une société de gestion d’OPCVM. Titulaire d’un Master en Gestion d’Entreprise de l’École Supérieure de Gestion (ESG) de Paris, avec une spécialisation en contrôle de gestion et organisation d’entreprise, il a également étudié l’anglais des affaires au St Giles College de Highgate, où il a obtenu le diplôme de la London Chamber of Commerce. Sa carrière professionnelle débute en 2005 chez Sanofi-Aventis Afrique centrale à Douala, où il occupe le poste de Contrôleur Financier Région Afrique centrale. Cette première expérience significative lui permet de développer une expertise dans la gestion financière régionale et la coordination d’équipes multinationales. Entre 2010 et 2012, il rejoint Afinis Communications (Groupe Cable & Wireless/Monaco Telecom) en qualité de Directeur Administratif et Financier pour la filiale Cameroun, où il a structuré la direction financière et mis en place une organisation fonctionnelle entre la filiale et la direction régionale de Casablanca. Son parcours dans le secteur des télécommunications se poursuit avec Orange, d’abord comme Directeur Administratif et Financier d’Orange Centrafrique (2013-2017), puis comme Finance Project Manager chez Orange Cameroun (2017-2018). Durant ces années, il pilote des projets majeurs de transformation digitale et de restructuration financière, contribuant notamment au retour à la rentabilité de la filiale centrafricaine malgré la crise sécuritaire qui prévalait pendant cette période. En 2019, il crée BJ Consulting Sarl, un cabinet de conseil aux entreprises démontrant son esprit entrepreneurial et sa capacité à accompagner les entreprises dans leur développement. Cette expérience est suivie d’une mission stratégique comme Manager de transition en tant que Directeur de l’Administration et des Finances de la Société Béninoise d’Infrastructures Numériques (SBIN SA) de 2020 à 2021 qui aujourd’hui commercialise la marque Celtiis Depuis mai 2022, il dirige Saphir Asset Management SA, où il a dynamisé la croissance des actifs sous gestion atteignant 26 milliards FCFA et augmenté les revenus de 20%. Sous sa direction, la société a été nominée parmi les 5 meilleures SGO de l’UEMOA aux BRVM Awards. Son leadership repose sur une forte orientation vers les résultats, une capacité à développer les compétences des équipes, et une approche rigoureuse de la gestion financière. Il a démontré tout au long de sa carrière une expertise particulière dans la transformation et la restructuration d’entreprises, le pilotage de projets complexes de digitalisation, la mise en place de systèmes de contrôle et de gouvernance, la gestion de la conformité et des risques, le développement commercial et la gestion d’actifs, la formation et le coaching afin de faire monter en compétences les équipes.
Tout d’abord, pouvez-vous nous dire quelques mots sur Saphir Asset Management et ses activités ?
Saphir Asset Management S.A (SAPHIR AM) est une filiale de SGI-Bénin, spécialisée dans la gestion d’Organismes de Placement Collectif en Valeurs Mobilières (OPCVM). Agréée en 2017 par l’Autorité des Marchés Financiers de l’Union Monétaire Ouest Africaine (AMF-UMOA) sous le numéro SG/2017-02, la société s’inscrit dans une démarche professionnelle et réglementée de gestion d’actifs financiers, visant à offrir des solutions d’investissement sécurisées et performantes aux particuliers comme aux institutionnels. Depuis sa création, Saphir Asset Management s’est distinguée par la performance et la diversification de ses Fonds. Ses deux Fonds Communs de Placement (FCP) illustrent cette réussite :
- FCP SAPHIR Quiétude qui est un Fonds de type obligataire et autres titres de créances, axé sur la préservation du capital et la génération d’un revenu régulier. Ce fonds cible principalement les investisseurs recherchant stabilité et sécurité, tout en bénéficiant de rendements supérieurs à ceux d’un compte épargne classique. Ce Fonds affiche une performance à l’origine de 60,23%
- FCP SAPHIR Dynamique est un Fonds à orientation mixte, combinant actions et obligations. Il vise à optimiser la performance tout en maîtrisant le risque grâce à une allocation équilibrée entre les actifs à revenu fixe et les instruments de marché. Ce Fonds est plus adapté aux investisseurs avec un profil plus dynamique et des objectifs de croissance du capital à moyen et long terme. La performance à l’origine de ce Fonds est de 61,21%
Ces Fonds constituent un levier stratégique d’accès aux marchés financiers régionaux, permettant aux investisseurs de participer aux opportunités offertes par les actions, obligations et bons du Trésor au sein de l’espace UMOA. Grâce à leur flexibilité et à leur diversité, ils répondent efficacement aux différents profils d’investisseurs, qu’il s’agisse de particuliers, de sociétés ou d’institutionnels, et aux objectifs variés, allant de la préservation du capital à la maximisation de la performance. Au-delà de la performance financière, Saphir Asset Management met l’accent sur la transparence, la rigueur et la gestion des risques, éléments essentiels pour renforcer la confiance des investisseurs et soutenir le développement du marché financier régional.
En quoi consiste le quotidien d’un Asset manager en Afrique ? Existe-t-il une spécificité africaine dans l’exercice de ce métier ?
Le quotidien d’un Asset Manager en Afrique consiste à optimiser la performance des portefeuilles de ses clients tout en maîtrisant les risques et en respectant les réglementations locales, notamment celles de l’AMF-UMOA. Ses missions englobent le suivi des marchés financiers, l’analyse économique et géopolitique, l’allocation d’actifs, les opérations de marché, le contrôle de la valeur liquidative et la conformité réglementaire. Il doit également assurer une gestion rigoureuse des risques (crédit, taux, change, diversification, LBC/FT), garantir la transparence comptable et fiscale à travers un reporting régulier, et maintenir une communication claire et rassurante avec les clients. Ce rôle exige une vigilance constante dans un environnement marqué par la volatilité des marchés, les incertitudes politiques et les contraintes réglementaires, ce qui fait de l’Asset Manager un acteur clé de la création de valeur et de la confiance des investisseurs.
Concrètement, comment évaluez-vous les actifs potentiels pour l’acquisition ou la cession ?
L’évaluation des actifs potentiels pour l’acquisition ou la cession repose sur une approche rigoureuse et multidimensionnelle combinant analyses financières, sectorielles, macroéconomiques et qualitatives. Elle inclut l’examen des états financiers et de la capacité de l’émetteur à générer des flux de trésorerie, l’évaluation des perspectives futures selon différents scénarios économiques, l’étude du secteur et de son environnement (notamment les spécificités africaines liées à la réglementation, à la stabilité politique et à la concurrence), ainsi que l’analyse de la liquidité et du risque de marché. Cette démarche est complétée par une comparaison entre la valeur intrinsèque et le prix de marché afin d’identifier les écarts de valorisation. L’objectif est de protéger l’épargne des investisseurs tout en recherchant un équilibre optimal entre rendement, risque et horizon d’investissement.
Comment arrivez-vous à équilibrer les objectifs de placement à court et à long terme dans votre portefeuille ?
L’équilibre entre le court terme et le long terme repose avant tout sur une stratégie de diversification rigoureuse. Ainsi, à court terme, nous privilégions des placements sécurisés et liquides, tels que les bons du Trésor ou les dépôts à terme, qui permettent d’assurer la stabilité du portefeuille et de répondre rapidement aux besoins de trésorerie des investisseurs. Ces instruments servent de « matelas » de sécurité et réduisent l’exposition aux chocs de marché. Cependant, À long terme, nous orientons une partie du portefeuille vers des actifs à plus fort potentiel de croissance, comme les actions d’entreprises solides, les obligations d’entreprises de premier rang ou encore les investissements sectoriels stratégiques (infrastructures, énergie, immobilier). Les émissions d’obligations des états de la zone UMOA constituent également des options de placement sérieuses. Ces choix visent à générer une création de valeur durable et à profiter des opportunités offertes par le développement économique régional. En parallèle, nous utilisons des outils de gestion des risques et d’allocation d’actifs dynamique, qui permettent d’ajuster la répartition entre court et long terme en fonction :
- de l’évolution de la conjoncture macroéconomique ;
- des objectifs spécifiques de performance fixés par nos clients ;
- et du profil de risque associé à chaque portefeuille.
Ainsi, la combinaison de placements défensifs et liquides à court terme avec des investissements de croissance à long terme nous permet de garantir à la fois sécurité, performance et pérennité.
Selon vous, en quoi la gestion d’actifs peut-elle être un instrument de croissance économique pour les pays africains ?
La gestion d’actifs constitue un levier majeur de croissance économique pour les pays africains en mobilisant l’épargne domestique, souvent peu exploitée, et en l’orientant vers le financement de projets publics et privés à forte valeur ajoutée. Elle favorise ainsi la création d’emplois, le développement d’infrastructures, la diversification économique et l’innovation, tout en renforçant la stabilité financière grâce à la diversification des sources de financement au-delà du secteur bancaire. En élargissant la base des investisseurs, en approfondissant les marchés de capitaux et en promouvant l’inclusion financière par des produits accessibles, elle s’impose non seulement comme un outil de rentabilité, mais aussi comme un moteur de transformation structurelle, de résilience et de développement social pour l’Afrique.
L’activité d’Asset Management est relativement nouvelle en Afrique francophone, contrairement à la partie anglophone. A quoi peut-on attribuer ce retard ?
L’activité d’Asset Management en Afrique francophone est relativement récente comparée aux pays anglophones, en raison d’une culture boursière limitée, d’une prédominance de l’épargne traditionnelle et de l’économie informelle, de la faible éducation financière et de la jeunesse des marchés financiers dont le cadre réglementaire ne s’est consolidé que progressivement. Toutefois, les réformes de l’AMF-UMOA et de la BCEAO, associées à la digitalisation, à l’essor des fintechs et au développement du mobile money, stimulent aujourd’hui l’inclusion financière et l’émergence d’une nouvelle génération d’investisseurs, ouvrant la voie à une croissance rapide et à un rattrapage progressif sur les marchés anglophones.
Quel est votre sentiment sur la façon dont la gestion d’actifs est régulée ? Les dispositifs d’encadrement juridique et règlementaire du secteur, vous semblent-ils adaptés ?
La régulation de la gestion d’actifs dans l’UMOA, pilotée par l’AMF-UMOA, a enregistré des avancées notables grâce à l’instruction n°66/2021 et ses circulaires, renforçant la protection des investisseurs, la transparence et la confiance sur le marché financier régional à travers des exigences strictes de conformité, de gestion des risques et de reporting. Toutefois, pour rester adaptée aux mutations du secteur et aux réalités africaines, elle doit encore évoluer afin d’encourager l’innovation financière (fintechs, digitalisation, fonds alternatifs), alléger certaines lourdeurs administratives freinant la compétitivité, et moderniser davantage le marché francophone afin de rivaliser avec les places anglophones plus dynamiques.
Quels sont vos prochains projets ? Comptez-vous lancer d’autres produits à court ou moyen terme ?
Notre ambition est d’élargir progressivement la gamme de produits financiers que nous proposons, afin de répondre de manière plus fine aux besoins variés du marché. À court terme, nous travaillons activement sur le lancement d’un Fonds Monétaire, dont le processus d’agrément est en cours auprès du régulateur. Ce véhicule d’investissement est particulièrement pertinent pour la gestion de trésorerie, car il offre une solution souple, sécurisée et adaptée non seulement aux entreprises (corporate), qui recherchent une optimisation de leur excédent de liquidité, mais également aux particuliers, qui souhaitent disposer d’un produit simple, liquide et faiblement risqué. Parallèlement, nous avons pour objectif, à moyen terme, de renforcer de manière significative la digitalisation de nos services. L’enjeu est double : d’une part, simplifier l’accès aux différents Fonds que nous gérons grâce à des plateformes en ligne et des applications mobiles intuitives ; d’autre part, accroître la transparence et la proximité avec nos investisseurs à travers des outils digitaux de reporting et de suivi en temps réel de leurs placements. Cette orientation technologique constitue un levier essentiel pour élargir notre base d’investisseurs et démocratiser davantage l’investissement collectif. Nous visons en particulier deux cibles stratégiques :
- La diaspora africaine, qui manifeste un intérêt croissant pour des solutions sécurisées d’investissement dans la région ;
- Les jeunes actifs, souvent plus familiers des outils numériques et désireux d’accéder à des produits financiers flexibles et accessibles, avec de faibles tickets d’entrée.
En résumé, nos projets s’inscrivent dans une logique de diversification de l’offre, de modernisation des canaux de distribution et de démocratisation de l’investissement, avec l’ambition de contribuer activement à la profondeur et à la vitalité du marché financier régional.
Interview réalisée par A.C. DIALLO – © Magazine BUSINESS AFRICA
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