Titulaire dÔÇÖun Master 2 en Sciences Actuarielles et Financi├¿res, de lÔÇÖInstitut des Sciences Financi├¿res dÔÇÖAssurances (ISFA) et dÔÇÖune Maitrise dÔÇÖEconom├®trie obtenue ├á lÔÇÖUniversit├® Paris I Panth├®on Sorbonne, Idrissa COULIBALY totalise plus de 15 ans dÔÇÖexp├®rience dans la Gestion des Risques financiers et dans la Gestion dÔÇÖActifs en Europe et en Afrique. Il d├®bute sa carri├¿re dans le Groupe Banque Populaire Caisses dÔÇÖEpargne (BPCE) ├á la Direction des Risques, en tant que Risk Manager de 2008 ├á 2013, puis comme Responsable projets SI Notation Cr├®dit de 2013 ├á 2015. En 2016, il occupe les fonctions de Responsable Risques ├á LCL, Cr├®dit Agricole Paris, o├╣ il fut notamment responsable du pilotage, de la surveillance et de la ma├«trise des risques ; op├®rant parall├¿lement depuis 2011, en qualit├® de consultant et formateur en Gestion des Risques pour les Banques, Etablissements de Cr├®dit et Compagnies en Afrique.
M.ÔÇêCOULIBALY a ensuite exerc├® en 2019, au sein de la Banque Nationale dÔÇÖInvestissement de C├┤te dÔÇÖIvoire (BNI C├┤te dÔÇÖIvoire), en tant que Directeur de la Gestion des Risques avant dÔÇÖ├¬tre nomm├® en janvier 2023 comme Directeur G├®n├®ral de la filiale d├®di├®e ├á la Gestion dÔÇÖactifs, BNI Gestion.
Dans cette interview, il revient sur les enjeux li├®s ├á la gestion dÔÇÖactifs en Afrique et la sp├®cificit├® de lÔÇÖapproche de la BNI Gestion dans lÔÇÖindustrie financi├¿re.
Lorsque lÔÇÖon parle de gestion dÔÇÖactifs, de quoi sÔÇÖagit-il exactement ?
La gestion d’actifs, ├®galement appel├®e Asset Management, consiste ├á g├®rer des capitaux, qu’ils soient d├®tenus en propre ou confi├®s par un investisseur.
L’objectif est d’obtenir le meilleur rendement possible en fonction du niveau de risque pris par lÔÇÖinvestisseur. Cette industrie financi├¿re regroupe l’ensemble des acteurs g├®rant des actifs financiers dans une perspective de valorisation. On peut citer les soci├®t├®s de gestion de patrimoine (SGP), les agences de notation, les soci├®t├®s de gestion et dÔÇÖinterm├®diation (SGI) et les soci├®t├®s de gestion dÔÇÖOrganismes de Placement Collectif (OPC) dont BNI GESTION.
Les soci├®t├®s sp├®cialis├®es dans la gestion dÔÇÖactifs peuvent ├¬tre ┬½ ind├®pendantes ┬╗ ou ├¬tre des filiales de Banques (cÔÇÖest le cas pour BNI GESTION) ou de compagnies dÔÇÖassurance. Elles pratiquent de plus en plus une gestion ├á la carte : en fonction de lÔÇÖobjectif patrimonial dÔÇÖun client par exemple, la pr├®paration de la retraite, le financement dÔÇÖun projet futur, le gestionnaire choisit la meilleure allocation dÔÇÖactif possible, align├®e sur le niveau de risque accept├® par le client.
La gestion d’actifs peut prendre diff├®rentes formes, telles que la gestion pilot├®e, la gestion collective, la gestion active et la gestion indicielle ou passive. BNI GESTION intervient dans la gestion collective par lÔÇÖinterm├®diaire de ces huit (8) Fonds commun de placement (FCP).
Quelle appr├®ciation portez-vous sur lÔÇÖ├®volution de la gestion dÔÇÖactifs en Afrique et plus particuli├¿rement en C├┤te dÔÇÖIvoire ?
La gestion d’actifs en Afrique affiche une bonne dynamique de croissance et est particuli├¿rement marqu├®e par une prise de conscience de l’importance de la diversification des investissements.
SÔÇÖagissant de la zone UMOA (8 pays de lÔÇÖUnion Mon├®taire Ouest Africain), lÔÇÖAssociation Professionnelle des Soci├®t├®s de Gestion et dÔÇÖInterm├®diation (APSGI) et lÔÇÖAssociation des Soci├®t├®s de Gestion dÔÇÖOPC (ASGOP) jouent un r├┤le cl├® dans lÔÇÖanimation du march├® en parfaite coordination avec le r├®gulateur et toutes les autres parties prenantes. De mani├¿re chiffr├®e, on peut constater que les encours sous gestion des Soci├®t├®s de Gestion dÔÇÖActifs (SGO) ont progress├® de 25% ├á plus de 1480 Mds FCFA (autour de 2,2 Mds dÔÇÖeuros) ├á fin 2023, traduisant ainsi une bonne dynamique de collecte de ressource.
En C├┤te d’Ivoire, le secteur se d├®veloppe progressivement, b├®n├®ficiant de la stabilit├® macro├®conomique et de l’innovation financi├¿re. Par exemple, selon la Direction du Tr├®sor Public et de la Comptabilit├® Nationale, pour le financement des budgets, les ├ëtats ont mobilis├® 8.476,9 milliards de FCFA en 2022 et 22.022,9 milliards de FCFA au premier trimestre 2023 sur le march├® des titres publics de lÔÇÖUMOA.
En d├®finitive, le secteur est en pleine ├®volution mais il y a encore une grosse marge de progression ├á conqu├®rir gr├óce ├á une d├®mographie de plus en plus galopante et jeune, constituant un vivier en termes de collecte des ressources longues.
Pensez-vous quÔÇÖil existe des sp├®cificit├®s africaines dans la gestion dÔÇÖactifs ? Si Oui, lesquelles ?
Oui, pour ma part il en existe.
Les sp├®cificit├®s de la gestion d’actifs en Afrique peuvent inclure l’adaptation aux march├®s locaux, la prise en compte des risques politiques et ├®conomiques sp├®cifiques, et enfin le d├®veloppement de produits adapt├®s aux besoins des investisseurs africains (sp├®cificit├®s sociales, culturelles).
A titre dÔÇÖexemple, certains investisseurs en Afrique tiennent compte dans le choix de leur placement et au-del├á de la recherche du rendement, du respect des pr├®ceptes religieux ou des valeurs partag├®es en termes dÔÇÖ├®thiques en lien avec leurs croyances. CÔÇÖest ├á ce titre que, parmi les 8 fonds g├®r├®s par BNI Gestion, nous avons con├ºu 2 fonds ├á vocation ├®thique et permettant ├á nos investisseurs de reverser tout ou partie de la plus-value de leur placement ├á des associations/┼ôuvres caritatives.
Selon vous, en quoi la gestion d’actifs peut-elle ├¬tre un instrument de croissance ├®conomique pour les pays africains ?
La gestion d’actifs peut jouer un r├┤le essentiel dans la croissance ├®conomique des pays africains ├á travers le financement des projets structurants.
De mani├¿re concr├¿te, la gestion d’actifs permet de mobiliser les ressources longues pour financer des projets d├®veloppement et ├á fort impact social dans les domaines tels que l’infrastructure, l’├®nergie, et lÔÇÖ├®ducation. LÔÇÖactivit├® de gestion dÔÇÖactifs est relativement nouvelle en Afrique francophone, contrairement ├á la partie anglophone.
A quoi peut-on attribuer ce retard ?
En Afrique francophone, la gestion d’actifs est en effet moins d├®velopp├®e que dans la partie anglophone du continent. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce retard dont :
ÔÇó LÔÇÖhistorique et le Contexte : L’essor de la gestion d’actifs a ├®t├® plus pr├®coce dans les pays anglophones, notamment en Afrique du Sud et au Nigeria.
Les march├®s financiers anglophones ont b├®n├®fici├® d’une plus longue histoire de d├®veloppement et d’une meilleure infrastructure.
A titre dÔÇÖexemple, la Bourse du Johannesburg ├®t├® cr├®├®e en 1887 et celle du Nig├®ria en 1960 contre 1996 pour la Bourse R├®gionale des Valeurs Mobili├¿res (BRVM) pour la zone UEMOA.
Il faut noter que cette dernière est la 5ième plus grande en capitalisation et offre encore une très bonne marge de progression.
ÔÇó La langue et la Formation : La langue anglaise est souvent privil├®gi├®e dans les domaines financiers internationaux, ce qui favorise le d├®veloppement de comp├®tences et de formations sp├®cifiques dans les pays anglophones.
Les professionnels form├®s en anglais ont eu plus d’opportunit├®s.
ÔÇó LÔÇÖinfrastructure financi├¿re : Les places financi├¿res anglophones, telles que Johannesburg, Lagos et Nairobi, ont attir├® davantage d’investissements et de gestionnaires d’actifs car les infrastructures de march├®, les r├®gulations et les incitations ont ├®t├® plus favorables dans ces pays en lien avec lÔÇÖexp├®rience capitalis├®e.
ÔÇó La sensibilisation et lÔÇÖ├®ducation financi├¿re : La sensibilisation ├á la culture financi├¿re et boursi├¿re est essentielle pour le d├®veloppement de la gestion dÔÇÖactifs et des march├®s financiers de mani├¿re plus large.
Les pays anglophones ont souvent ├®t├® plus actifs dans la promotion de l’├®ducation financi├¿re et de l’investissement en bourse. M├¬me sÔÇÖil faut reconnaitre que la culture de lÔÇÖentreprenariat de ces populations joue ├®galement un r├┤le essentiel.
ÔÇó La stabilit├® politique et ├®conomique essentielle pour attirer les investisseurs et les maintenir dans la dur├®e.
Il est souvent ├®voqu├® lÔÇÖinsuffisance de produits de placements, en dehors de ceux ├®mis par les Etats, pour expliquer le manque de dynamisme du secteur. Etes-vous de cet avis ?
L’insuffisance de produits de placement diversifi├®s peut effectivement limiter le dynamisme du secteur, car elle restreint les options des investisseurs et la capacit├® ├á g├®rer efficacement les risques.
Au sein de la zone UMOA, cette insuffisance devrait normalement ├¬tre corrig├®e par la mise en ┼ôuvre de nouvelles r├®formes et des projets en cours entre les acteurs du march├®, BRVM : plateforme dÔÇÖinterconnexion boursi├¿re, bourse des mati├¿res premi├¿res agricoles, Fonds dÔÇÖInvestissement Alternatifs, Fonds Commun de Placement ├á Risques en faveur du financement des PME, etc.
Quel est votre sentiment sur la fa├ºon dont la gestion dÔÇÖactifs est r├®gul├®e dans lÔÇÖUMOA, zone o├╣ vous exercez ? Les nouveaux dispositifs dÔÇÖencadrement juridique et r├¿glementaire du secteur, vous semblent-ils adapt├®s ?
La r├®gulation de la gestion d’actifs au sein de l’UMOA est la pr├®rogative de lÔÇÖAutorit├® des March├®s Financiers de lÔÇÖUnion Mon├®taire Ouest Africain (AMF-UMOA).
Notre r├®gulateur a entrepris depuis 2020, une s├®rie de r├®vision et de reformes du cadre r├¿glementaire de lÔÇÖactivit├® boursi├¿re dans la zone ├á lÔÇÖeffet de favoriser le d├®veloppement du march├® financier.
Sur les ├®volutions r├®centes, on peut citer la mise en ┼ôuvre dÔÇÖun cadre r├®glementaire relatif aux Fonds Commun de Placement ├á Risque ┬½ FCPR ┬╗, la publication dÔÇÖune taxonomie des projets verts susceptibles de faire lÔÇÖobjet dÔÇÖ├®mission obligataires vertes, sociales et durables sur le march├® financier.
Cependant, la r├®gulation des entreprises de technologies financi├¿res (Fin Tech) associ├®es aux acteurs actuels pourraient acc├®l├®rer le d├®veloppement du March├® et renforcer la stabilit├® et l’efficacit├® du march├® financier de l’UMOA.
Quelles sont les actions privil├®gi├®es, qui doivent ├¬tre men├®es pour moderniser et rendre le march├® financier r├®gional plus attractif ?
Pour moderniser et rendre le march├® financier r├®gional plus attractif, plusieurs actions peuvent ├¬tre envisag├®es ├á commencer par :
Vulgariser lÔÇÖ├®ducation financi├¿re et boursi├¿re : il est important pour nos Etats dÔÇÖincorporer lÔÇÖ├®ducation financi├¿re et boursi├¿re dans nos programmes ├®ducatifs pour permettre aux populations dont ┬½ 70% a moins de 30 ans ┬╗ dÔÇÖavoir des notions sur lÔÇÖimportance de lÔÇÖ├®pargne financi├¿re.
Pour ce qui concerne BNI Gestion, en synergie avec la Banque Nationale dÔÇÖInvestissement et la SGI BNI Finances, nous avons lanc├® fin 2023 un vaste programme de sensibilisation sur la culture financi├¿re ├á lÔÇÖendroit des ├®tudiants et jeunes dipl├┤m├®s, en partenariat avec lÔÇÖensemble des Universit├®s et les Grandes Ecoles (Institut National Polytechnique Houphou├½t Boigny de Yamoussoukro (INPHB) ├á Abidjan, Centre dÔÇÖEtudes Africain et de Gestion ├á Dakar (CESAG).
Renforcer la base des investisseurs : Il est essentiel dÔÇÖinciter les investisseurs institutionnels et surtout les populations ├á participer aux op├®rations dÔÇÖOPV (offre publique de vente) et dÔÇÖ├®mission des obligations souveraines ou priv├®es sur le march├® primaire. Ce renforcement passe en grande partie par lÔÇÖam├®lioration des conditions et des moyens dÔÇÖacc├¿s au march├® ;
Instituer un Fonds de protection des ├®pargnants : Ce fonds va renforcer la confiance des investisseurs vis-├á-vis du march├® ;
Digitaliser le processus de lÔÇÖinvestissement sur le march├® financier : Il sÔÇÖagira dÔÇÖadopter une logique de digitalisation du processus financier, ce qui va au-del├á de la simple d├®mat├®rialisation.
LÔÇÖimplication des Fintech (IA, gestion de flux important) dans ce process permettra de transformer, dÔÇÖintroduire et de d├®ployer de nouveaux services financiers adapt├®s sur les territoires de la zone UMOA ;
Renforcer les capacit├®s op├®rationnelles des collaborateurs : les acteurs m├®tiers auront une bonne compr├®hension des enjeux en lien avec lÔÇÖimplication des Fintech et la gestion de lÔÇÖactivit├®.
Quelques mots sur BNI Gestion dont vous assurez la Direction G├®n├®rale, quelle est sa sp├®cificit├® sur le march├® financier ivoirien et ses perspectives de d├®veloppement ?
BNI Gestion est une Soci├®t├® de Gestion dÔÇÖOPCVM (SGO) agr├®├®e par lÔÇÖAMF-UMOA. Elle est filiale de la BNI, Banque Nationale dÔÇÖInvestissement de C├┤te dÔÇÖIvoire, premi├¿re Banque Citoyenne class├®e 5├¿me sur le plan National avec plus de 1700 Mds de taille de bilan ├á fin 2023.
Pionni├¿re et acteur majeur de lÔÇÖindustrie de la gestion de lÔÇÖ├®pargne financi├¿re depuis environ 15 ans, BNI Gestion se distingue par :
1- La diversit├® et lÔÇÖaccessibilit├® de son offre de produits de placements dont (2) fonds diversifi├®s ├á vocation ├®thique, (3) fonds d├®di├®s ├á la retraite compl├®mentaire des entreprises et (3) fonds grand public dont (1) obligataire ;
2- Sa strat├®gie dÔÇÖinvestissement dynamique et par la performance de ses fonds : Nos fonds ├®thiques ont ├®t├® class├®s 1er et 2i├¿me en termes de performance de valeur liquidative au premier semestre 2023 ;
3- Son engagement envers ses clients.
Interview r├®alis├®e par A.C.ÔÇêDIALLO – ┬® Magazine BUSINESS AFRICA
Laisser un commentaire