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Interview – Kamel KONE, Président du GES PETROGAZ-CI – Cofondateur et Directeur Général Adjoint de HYDRODRILL S.A : « La transition vers les énergies bas carbone est à la fois un défi et une opportunité pour les pays africains »

Tout d’abord, pouvez-vous nous dire quelques mots sur les missions du Ges Petrogaz CI ainsi que les activités de Hydrodrill SA ?

Le GESPETROGAZ CI (Groupement des Entreprises de services Pétroliers et Gaziers de Côte d’Ivoire est un groupement qui a pour mission de promouvoir les entreprises pétrolières et gazières de côte d’Ivoire et veiller à la protection de leurs intérêts.
Le GESPETROGAZ a joué un rôle important dans l’élaboration de la loi et les décrets relatifs au contenu local en Côte d’Ivoire. Nous accompagnons également les entreprises souhaitant s’installer en côte d’Ivoire en leur offrant l’expertise de nos membres.
HYDRODRILL SA est une entreprise 100% Ivoirienne créée par Monsieur KONE MOUCTAR, le Président Directeur Général. Nous avons l’honneur d’être une des premières entreprises Ivoirienne à détenir des participations dans un bloc pétrolier en production en Côte d’Ivoire, le bloc CI-11 et Récemment, sur le bloc CI-705 en exploration à travers la compagnie ICE OIL AND GAS.
Nous fournissons également des services pétroliers en offshore et onshore et sommes présents en Côte d’Ivoire, en Guinée Equatoriale et débutons notre installation au Congo et au Gabon. Nous intervenons sur toutes les opérations de « Wells interventions » .

Le secteur Oil & Gas a toujours été́ marqué par une grande volatilité́ : les chutes et les hausses de cours ne sont jamais très prévisibles. Quelles en sont, selon vous, les raisons ?

Vous avez bien raison, la volatilité des cours est souvent imprévisible cependant certains éléments peuvent nous donner des indications sur des fluctuations à venir, notamment la loi de l’offre et la demande qui représente la base de la détermination des cours.
Il est important de mentionner le rôle de l’OPEP (l’organisation des pays producteurs de pétrole) qui régule les quantités et les prix avec l’instauration de quotas de productions.
La Géopolitique et les conflits sont également ne sont pas étrangers à ces fluctuations.

Pensez-vous que le contexte de crises géopolitiques que nous vivons aura un effet durable sur la croissance de la demande énergétique mondiale ?

Forcément ! Vous avez pu constater que certains conflits ont conduits à une hausse des prix de l’énergie à l’échelle mondiale. Pour être un peu plus précis, la guerre en Ukraine a provoqué des perturbations majeures dans l’approvisionnement énergétique, notamment en Europe, qui dépendait fortement du gaz russe. Les sanctions économiques contre la Russie et la réduction des exportations russes de gaz et de pétrole vers l’Europe ont forcé les pays européens à diversifier leurs sources d’approvisionnement en énergie, en se tournant davantage vers le gaz naturel liquéfié (GNL) et en accélérant leur transition vers les énergies renouvelables.
D’autre part, l’Iran a vu ses exportations limitées, ce qui a créé une certaine volatilité des prix du pétrole.
Ces crises ont non seulement perturbé les marchés énergétiques mondiaux, mais elles ont également accéléré les changements structurels dans la demande énergétique, poussant vers une transition plus rapide vers des sources d’énergie alternatives.

Il y a aujourd’hui une accélération de la transition vers les énergies bas carbone. Comment les pays africains, producteurs de pétrole, doivent-ils y faire face ?

La transition vers les énergies bas carbone est à la fois un défi et une opportunité pour les pays africains. Alors que le continent continue de se développer, il est essentiel de trouver un équilibre entre l’exploitation des ressources naturelles pour stimuler la croissance économique et la réduction de l’empreinte carbone pour lutter contre le changement climatique.
Il y a là un débat sur la transition énergétique en Afrique, qui est souvent marqué par une double contrainte : la nécessité de se développer économiquement en utilisant les ressources disponibles et la pression internationale pour réduire les émissions de carbone.
Les grandes puissances d’aujourd’hui ont largement profité de leurs ressources fossiles pour bâtir leur richesse et asseoir leur développement industriel. Pendant des décennies, le charbon, le pétrole, et le gaz ont été les piliers de la croissance économique en Europe, en Amérique du Nord, et en Asie.
Aujourd’hui, alors que ces nations ont atteint un niveau de développement élevé et qu’elles sont en train de passer à des énergies plus propres, on demande aux pays africains, qui sont encore en pleine phase de développement, de renoncer ou de limiter l’utilisation de leurs propres ressources fossiles.
Les ressources fossiles, telles que le pétrole, le gaz naturel, et le charbon, sont parmi les plus importantes richesses naturelles de l’Afrique. Pour de nombreux pays africains, ces ressources représentent non seulement une source majeure de revenus mais aussi un levier pour financer leur développement.
Pour que l’Afrique puisse progresser vers une transition énergétique équilibrée, il est indispensable que les grandes puissances et les institutions internationales offrent un soutien significatif. Cela inclut l’accès à des financements verts, des transferts de technologie, et des partenariats pour le développement des infrastructures énergétiques renouvelables. Ce soutien doit être conçu de manière à ne pas freiner le développement économique mais plutôt à l’accompagner, en offrant des solutions qui répondent aux réalités locales.

Selon certains experts, la demande mondiale de pétrole devrait atteindre un plateau vers 2030, notamment parce que l’Europe et la Chine auront basculé vers le véhicule électrique. Êtes-vous de cet avis ?

Je comprends que lorsqu’on parle de pétrole, chaque individu pense au prix du carburant à la pompe et au combustible qui permet à son véhicule de fonctionner, cependant la réalité est toute autre : Le pétrole ne sert pas uniquement à fabriquer du carburant pour les voitures, certains secteurs comme le maritime et l’aérien ne disposent pas encore d’alternatives électriques viables.
De plus, les industries pétrochimiques continueront à nécessiter du pétrole comme matière première, ce qui devrait maintenir une demande stable dans ces secteurs.

En Côte d’Ivoire, votre pays, le gisement « Baleine » est désormais en production, en partenariat avec l’italien ENI. Quels en sont les enjeux ?

Le gisement « Baleine », désormais en production, représente une opportunité majeure pour la Côte d’Ivoire. Cela permet au pays de rejoindre le cercle restreint des producteurs de pétrole, ce qui entraînera des retombées économiques significatives.
En partenariat avec ENI, cette production pourrait générer des revenus substantiels, stimuler les investissements, et améliorer le niveau de vie des Ivoiriens en créant des emplois et en soutenant le développement des infrastructures. Il est important de rajouter que ce projet se distingue non seulement par son ampleur, mais aussi par son engagement vers un objectif de « Net Zéro Émissions », une première en Afrique de l’Ouest.

Certains pays africains, à l’instar du Sénégal, envisagent de renégocier les contrats miniers, pétroliers et gaziers. En tant qu’expert du secteur, que vous inspire une telle décision ?

Nous parlons d’états souverains qui ont à cœur le développement de leurs industries et de leur pays. Chaque pays a ses contraintes et ses réalités, cependant, nous pouvons imaginer que ces contrats ont été signés dans des périodes où les cadres législatifs, les capacités de négociation et les conditions économiques étaient moins favorables. Lors de la renégociation des contrats, les gouvernements peuvent intégrer des clauses de contenu local pour s’assurer que les bénéfices de l’exploitation des ressources naturelles profitent davantage à l’économie nationale.

Comment selon vous, le continent africain devra-t-il concilier la nécessaire production d’hydrocarbures, pour son développement, et le respect des normes environnementales ?

J’en ai parlé précédemment il est important que l’Afrique exploite ses énergies fossiles afin de financer son développement. Les progrès technologiques permettent de limiter l’impact sur l’environnement et comme je vous disais, le gisement Baleine en côte d’ivoire est une production net zéro alors vous comprendrez que nous sommes en plein dedans.

Propos recueillis par A.C. DIALLO – ©Magazine BUSINESS AFRICA

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