Après avoir officié dans de grands cabinets de conseil, dont KPMG et Ernst & Young au Congo Brazzaville, César KOUKA préside aux destinées de Financing Access depuis sa création en 2018. Cette entreprise, qui ambitionne de devenir le premier développeur et producteur indépendant d’énergie renouvelable en Afrique francophone subsaharienne, est également très impliquée dans la finance et le secteur de l’agro-industrie.
C’est justement sur les enjeux de l’agro-industrie africaine que porte l’entretien qu’il a accordé au Magazine BUSINESS AFRICA. Il revient également sur les engagements de l’entreprise et détaille ses axes de développement.
Vous avez choisi de vous consacrer au développement des énergies renouvelables et du secteur agro-industriel. Pourquoi ce choix ?
Ce choix est né suite à plusieurs échanges avec des partenaires marocains, français et chinois, et, au regard du déficit que présentait mon pays le Congo dans ces secteurs. Cependant, pour nous, l’industrialisation de l’Afrique ne peut se faire sans un secteur énergétique stable et accessible. Il était donc important pour nous que soit développer prioritairement en RDC, le secteur énergétique et notamment le solaire. L’avantage de cette option est sa mise en œuvre, qui peut être faite dans une durée relativement plus courte que celle de grands projets Hydroélectrique. Ce choix est tout aussi motivé par la question de développement social.
Pour ce faire, il est envisagé l’intensification de l’électrification rurale et amélioration de la fourniture dans les localités urbaines.
Ce choix a également été motivé par le fait que nous avons voulu contribuer à l’amélioration de la sécurité alimentaire des communautés les plus vulnérables des pays au sein desquels nous opérons et même ailleurs en Afrique. C’est le cas en Sierra Leone où nous ne sommes pas encore matériellement installés, mais où nous travaillons et espérons mettre en place un important projet dans la filière rizicole.
Et enfin, notre choix est motivé par la création des opportunités d’emploi pour les jeunes et les femmes en les engageant dans des activités agricoles et de transformation des produits de leur culture.
Investir dans le secteur agro-industriel requiert de gros investissement, autrement dit de disposer de ressources financières de longue maturité, ce qui est rare en Afrique. Comment vous y êtes-vous pris ?
Cet exercice reste d’une grande complexité sauf pour les multinationales.
Cependant, nous restons convaincu qu’un meilleur accès aux Banques de développement serait de nature à faciliter l’accès aux sources de financement pour l’ensemble des jeunes opérateurs africains.
Pour notre part, nous nous appuyons sur les membres de notre Board, tel que Green Power Capital dirigée par M. Song Dongsheng, ancien Président de SHINA POWER et de SHYNOHYDRO et ancien Président de l’Association International Hydraulique. Easten AFrican Power que dirige M. Dan Klick, et du réseau qu’ils ont su nouer.
Nous avons également bénéficié de l’accompagnement de Banques de développement telle que Trade Développement Bank, notamment dans le secteur énergétique.
Il est clair que de nombreux efforts restent à déployer, spécifiquement dans l’accès au financement du secteur agro-industriel.
Pensez-vous que, dans les pays où votre entreprise est implantée, le cadre juridique et fiscal est favorable au développement des industries agro-alimentaires ?
La Côte d’Ivoire pour nous, représente, ce bel exemple d’ouverture, au regard de son expérience dans ce secteur.
Les deux Congo n’en déméritent pas moins. L’adoption récemment au Congo Brazzaville de la Loi sur les Partenariats Public-Privé est une illustration des efforts consentis par le Gouvernement en vue de l’amélioration du climat des affaires.
Au Congo Brazzaville, il est tout aussi important de souligner les efforts consentis par le Gouvernement, sous le haut patronage de son Excellence Denis SASSOU NGUESSO, Président de la République, afin de redonner au secteur agricole Congolais sa place d’antan. Et nous nous inscrivons pleinement dans cette dynamique. Le cadre juridique demeure quasiment similaire, bien que nous estimons que plus d’efforts peuvent être fournis au niveau fiscal, dans le cadre d’une politique plus incitative.
Il est aujourd’hui question, dans beaucoup de pays africains, d’assurer la souveraineté alimentaire. Quels sont, selon vous, les préalables pour la réalisation cet objectif ?
L’Afrique n’a pas d’autre choix que d’accomplir sa révolution verte.
Aujourd’hui, plusieurs centaines de millions d’Africains dépendent de la filière agricole pour leurs revenus.
S’il parvient à se moderniser, le secteur agricole peut devenir le premier moteur d’une véritable croissance durable et permettre à l’Afrique de se hisser parmi les premières puissances agricoles au niveau mondial.
La crise en Ukraine et ses incidences en Afrique en sont la meilleure des illustrations.
L’agriculture africaine souffre aujourd’hui d’un sous-investissement chronique dans la transformation des aliments et d’un manque d’intégration dans la chaine d’approvisionnement.
Les produits primaires sont souvent exportés pour être traités dans des économies avancées, les produits finis étant ensuite ré-importés en Afrique.
L’Afrique a importé pour 65 milliards de dollars US de denrées en 2016, soit un tiers de toutes les denrées consommées sur le continent.
La vocation de Financing Access est d’investir sur une grande partie de la chaîne agricole afin de créer des emplois pérennes, de faire monter en gamme et transformer les cultures développées au sein des pays où nous sommes implantés et, enfin, de développer une filière d’élevage.
Quelles sont les perspectives de Financing Access pour les dix prochaines années ?
D’ores et déjà installé en République du Congo, en Côte d’Ivoire et en République Démocratique du Congo, Financing Access ambitionne de devenir un développeur et producteur indépendant d’énergies renouvelables (solaire et hydraulique) de premier plan ainsi qu’un acteur majeur du secteur agricole, en intervenant à chaque étape de la filière.
Promouvoir les technologies agroforestières pour améliorer la fertilité des sols et la protection des collines en introduisant des espèces d’arbres ayant des propriétés fixatrices d’azote, des déchets de biomasse et le potentiel de stabiliser et de transformer les paysages.
Nous ambitionnons également de devenir la première source de chèvres Boer du pays pour les agriculteurs, les commerçants et les propriétaires d’abattoirs engagés dans le secteur de la viande.
Nous voulons contribuer massivement à la création d’emplois pour les jeunes, contribuer à la souveraineté alimentaire, réduire la pauvreté et générer de la croissance avec les énergies vertes.
En Afrique, la production d’électricité est issue à 80 % d’énergies fossiles et constitue le premier poste d’émissions de CO2. Face à cet immense défi, les énergies renouvelables représentent un potentiel décisif.
Aujourd’hui, avec 6 GW de puissance installée (soit autant que les Pays-Bas), le solaire compte pour seulement 4 % du mix énergétique de l’Afrique, alors même que le continent abrite 40% des ressources mondiales.
La vocation de Financing Access est de produire une énergie verte, non seulement à destination des villes et des installations industrielles, mais aussi au bénéfice des agriculteurs et des acteurs de la chaîne de valeur agro-industrielle.
Propos recueillis par A.C DIALLO – ©Magazine BUSINESS AFRICA