Inscrit aux barreaux de Paris et de New York, Alpha DIALLO est associé (Partner) au Cabinet AZOULAY & DIALLO. Né en France de parents d’origine guinéenne (Guinée Conakry), Alpha DIALLO a fait ses études à l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne où il décroche deux diplômes : le Magistère de droit des activités économiques (MDAE) et le Master 2 en Droit et globalisation économique (en partenariat avec Sciences Po Paris et des universités américaines). Après avoir réussi l’examen d’entrée à l’Ecole de Formation du Barreau de Paris en 2010, il effectue en 2012/2013 un LLM à Boston University où il poursuivra une spécialisation en contentieux et arbitrage, tout en préparant l’examen du Barreau de New York, qu’il réussit en 2013. Il intègre l’équipe Contentieux du bureau parisien du cabinet Hogan Lovells de 2013 à 2015 puis rejoint le bureau parisien du Cabinet DLA Piper où il exercera tant au sein de l’équipe Contentieux qu’au sein de l’équipe Arbitrage international pendant 4 ans. Début 2019, Alpha DIALLO fait le choix de suivre Frédérik AZOULAY qui montait sa structure individuelle en contentieux. Fort de 6 ans de formation solide au sein de deux grands cabinets, cette nouvelle collaboration lui permettait de continuer de travailler avec les mêmes standards et avec un associé qu’il connaissait bien, tout en étant désormais plus impliqué dans le fonctionnement du cabinet et surtout le développement de clientèle. Après trois ans de collaboration, les deux avocats font le choix de s’associer en janvier 2022 en créant le Cabinet Azoulay & Diallo, dédié au traitement des litiges commerciaux complexes, tant en contentieux qu’en arbitrage.
En quoi consiste l’arbitrage international et à quoi attribuez-vous le regain d’intérêt pour ce type de règlement des conflits en Afrique ?
Pour l’essentiel, l’arbitrage est le processus par lequel des parties (personnes publiques ou privées) décident de soumettre le règlement de leur litige à un ou trois arbitre(s) qui sont des personnes agissant comme juges privés indépendants de l’appareil judiciaire d’un état.
A la différence d’un médiateur qui cherche à rapprocher les positions des parties pour trouver un accord, l’arbitre est investi d’une mission de jugement en droit (ou en équité si c’est le choix des parties) et la sentence arbitrale aura, in fine, force obligatoire au même titre que le jugement d’un tribunal étatique.
Pour les entreprises étrangères qui investissent en Afrique par le biais de contrats conclus avec des états africains ou des sociétés africaines, l’intérêt principal est de ne pas être contraintes de porter un litige devant les juridictions de l’Etat concerné qui pourraient manquer d’impartialité à leur égard.
Ceci est également vrai en dehors du cadre africain.
En outre, les parties peuvent préférer soumettre leurs litiges à l’arbitrage (plutôt qu’à un juge étatique) en raison de la spécificité ou technicité de la relation commerciale en cause qui pourra être mieux appréhendée par un arbitre qui est une personne elle-même spécialiste du secteur (exemple : les mines ou infrastructures pétrolières) ou de la question juridique à régler (exemple : le droit de l’environnement ou le droit des sociétés).
L’arbitrage est ainsi perçu comme offrant des garanties d’impartialité, de qualité, de rapidité et de sécurité juridique.
Existe-t-il, selon vous, un lien entre le recours à l’arbitrage et le volume d’investissement qu’un pays reçoit ?
Même si le lien est difficilement quantifiable, la clause d’arbitrage est présente dans la quasi-totalité des grands contrats encadrant l’investissement des sociétés étrangères dans un pays africain et les investisseurs ne se risqueraient pas à injecter des millions ou des milliards dans un projet d’infrastructure dans un pays africain sans avoir fait accepter le recours à l’arbitrage à l’Etat hôte ou à leurs co-investisseurs au sein d’une joint-venture.
Quelles sont, selon vous, les conditions ou éléments constitutifs d’un arbitrage réussi ?
La question est vaste et les réponses multiples mais le maître-mot en matière de contentieux (judiciaire ou arbitral) est l’anticipation.
En effet, ma première préoccupation lorsqu’on me soumet un nouveau dossier est de savoir ce que mon client a pu écrire ou faire durant la phase précontentieuse.
Autrement dit, dès lors que l’on anticipe un point de crispation dans la relation contractuelle, il faut faire attention à ce que l’on écrit, rassembler et conserver les preuves.
Les échanges écrits préalables à l’initiation d’une procédure d’arbitrage doivent être rédigés en tenant compte de leur impact dans la procédure contentieuse susceptible d’être initiée par l’une ou l’autre des parties par la suite.
Tout contentieux s’anticipe et se prépare le plus en amont possible.
Dans les litiges entre des parties qui n’ont pas le même niveau de sophistication, le défaut de préparation de la partie faible qui n’a pas été ou a été mal conseillée durant la phase précontentieuse est souvent criant au cours de la phase contentieuse.
Cette asymétrie en termes de sophistication, qui n’est souvent que le reflet du déséquilibre entre les ressources financières des parties, peut conduire à percevoir l’arbitrage comme un piège pour la partie dite faible.
Quelques mots sur le droit OHADA, quel bilan en faites-vous ? Pensez-vous qu’il y ait des choses à améliorer ?
Le droit OHADA a permis la modernisation et l’uniformisation des droits nationaux des états-membres.
Il constitue ainsi un indéniable progrès.
Néanmoins, du point de vue d’un praticien du contentieux, il faut relever qu’il n’a pas été suffisamment accompagné par le développement de l’accès à la jurisprudence des juridictions des Etats membres.
Même si l’on peut saluer quelques initiatives (des deux côtés de la Méditerranée) qui tendent à faciliter l’accès aux droits africains sur Internet, ainsi que les efforts de nombreux chercheurs et praticiens qui publient des ouvrages théorisant le droit OHADA ou les droits nationaux qui intègrent les textes de l’OHADA, le défaut d’accès à un corpus de jurisprudence significatif et organisé constitue un frein à la promotion des droits africains.
Ainsi, les parties à un contrat en lien avec un pays francophone d’Afrique de l’Ouest préfèrent encore à ce jour soumettre leur accord au droit français, la variante étant de soumettre l’accord au droit de l’état africain concerné, comme la Guinée par exemple, en autorisant expressément ou implicitement le recours à la jurisprudence française pour interpréter le droit du pays concerné.
Propos recueillis par A.C. DIALLO
© Magazine BUSINESS AFRICA – 2022