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ITW exclusive de Dr Andrew GWODOG, ADG de la SCG-Ré et Pdt de la FEGASA “Le COVID-19 est une opportunité pour le secteur des assurances de se réinventer”

Premier gabonais diplômé du cycle MST-A de l’Institut International des Assurances (IIA), Dr Andrew GWODOG a occupé des fonctions managériales au sein de plusieurs entreprises d’assurances gabonaises et africaines. Administrateur-Directeur Général de la SCG-Ré, il fut Directeur Général de NSIA Assurances Vie Congo, de OGAR Vie (Groupe OGAR) et bien d’autres. Ancien Vice-Président de la FEGASA (Fédération Gabonaise des Sociétés d’Assurances), membre du Comité Vie de l’Organisation Africaine des Assurances (OAA), Dr GWODOG est en outre Enseignant et chargé de cours d’assurances. Le 14 juillet 2020, il a été reconduit à la tête de la FEGASA pour un second mandat.
Rappelons que Dr GWODOG a également occupé la fonction de Ministre Délégué au Ministère des Eaux et Forêts de septembre 2015 à Octobre 2016.
En 2015, il s’inscrit au Programme DBA de Paris School of Business pour l’obtention d’un Doctorat sur le thème « Assurances et Croissance économique en Zone CIMA-CEMAC » avant d’en faire mon premier ouvrage en 2017. Ouvrage qui a remporté le trophée Amadou KOUROUMA lors de la 44ème Assemblée Générale de la FANAF en février 2020. L’assureur travaille actuellement sur son deuxième ouvrage, portant sur « l’Histoire de l’assurance au Gabon et en Zone CEMAC ».

Quelles appréciations avez-vous du métier d’assureur en Afrique ? Pensez-vous qu’il existe une spécificité africaine dans l’exercice de ce métier ?

L’assureur africain est perçu de différentes façon par les acteurs du marché. Lui-même se perçoit comme un métier nécessaire au développement de son continent mais encore incompris sinon mal appréhendé par les autres acteurs économiques.
L’Assuré lambda le perçoit comme celui qui sait vendre des produits d’assurances mais ne répond pas lors de la survenance du sinistre.
Les Autorités le perçoivent comme un métier nécessaire au développement du pays mais sans pourvoir en cerner les besoins et les priorités.
Le Régulateur perçoit l’assureur africain comme longtemps exposé et donc fragilisé par l’occident.
Il multiplie donc les mesures protectionnistes afin de lui donner la chance de se hisser à la hauteur de ses pairs de l’occident.
L’Assureur non africain perçoit l’assuré africain comme le petit poucet de l’assurance, celui qui est sur un continent qui regorge de niches d’assurances non encore exploitées.
L’assurance africaine a bien sûr ses spécificités.
Bien que calquée sur le modèle européen, l’assurance africaine par les caractéristiques de son continent, sa population et ses politiques se distingue du lot. L’appréhender nécessite de comprendre ses populations dont les besoins sont encore primaires (Alimentation, Éducation, Emploi, Infrastructures, etc.), son activité (L’informelle pour la plus grande partie) et son économie qui repose sur l’exploitation des matières premières.

On parle de l’avant et l’après COVID-19, serait-ce également le cas pour les assureurs ? Quels sont les défis auxquels seront confrontés les professionnels de l’assurance en Afrique et au Gabon en particulier ?

Avant la COVID-19, l’assurance s’achetait en ce sens que nous n’avions pas pensé à mettre en place des outils technologiques de vente des produits d’assurances en ligne via les NTIC et la digitalisation.
L’après COVID-19 c’est d’abord penser à développer de nouveaux produits d’assurance à travers la digitalisation.
C’est aussi réfléchir sur les problématiques nouvelles du secteur notamment, la dématérialisation des contrats, l’amélioration de la relation client à travers un paiement beaucoup plus diligent des sinistres ; réfléchir sur la distribution des produits d’assurances qui n’est plus dépendante des canaux traditionnels.
L’après COVID 19 c’est également la mise en place de contrats d’assurances adaptés couvrant la perte d’exploitation immatérielle ainsi que l’implication des assureurs auprès de leurs clients dans le cadre de la solidarité nationale.
C’est enfin vendre l’assurance automobile différemment à travers une tarification à la carte et la réduction des frais généraux à travers la digitalisation et le développement du télétravail qui a fait ses preuves durant cette pandémie.
De façon globale, l’après COVID-19 est une opportunité pour le secteur des assurances de se réinventer. Malheureusement, les assureurs vont-ils saisir cette occasion, telle est la question ?

Vous êtes à la tête de la Fédération Gabonaise des Sociétés d’Assurance (FEGASA), comment se présente, dans l’ensemble, le secteur de l’Assurance dans ce pays ? et quelle est la part contributive de ce secteur dans l’économie nationale ?

Le marché des assurances au Gabon, c’est un régulateur supranational constitué de la CIMA et de la Brigade de contrôle.
C’est aussi un régulateur national qui est la Direction Nationale des Assurances (DNA) au sein du Ministère de l’Économie.
L’animation du marché est effectuée par les sociétés d’assurances et un réassureur national réunis au sein de la FEGASA.
Quant à l’intermédiation, elle est assurée par les Courtiers et Agents réunis au sein de la Fédération Gabonaise des Courtiers d’Assurances (FGCA).
Le marché gabonais des assurances, c’est plus de 500 salariés, près de 100 milliards de chiffre d’affaires annuel, c’est un taux de pénétration de 1,2% et une contribution de 5% au Produit Intérieur Brut (PIB).

Quels sont les grands chantiers prioritaires de votre mandat en votre qualité de Président de la FEGASA ?

Porté en juillet 2018 à la tête de la FEGASA, la feuille de route de mon premier mandat était constituée des actions suivantes: le leadership du Gabon à l’international, le règlement diligent des sinistres à travers la mise en place en place du constat amiable, la convention d’indemnisation signée entre les différents opérateurs, la digitalisation du secteur et, en tant que partenaire de l’État, nous proposons de rendre obligatoire la souscription de quelques assurances Responsabilité Civile telles que la RC construction, RC des professions libérales ou RC mandataires sociaux.
De façon globale, le bilan de cette feuille de route est positif.
Il n’est plus à rappeler que l’assurance gabonaise a été sous le feu des projecteurs ces deux dernières années avec les innovations qu’elle a connu, notamment par la mise en place du constat amiable, sa dématérialisation, le lancement de l’application de souscription d’assurance automobile en ligne « Assurenligne », l’organisation des formations à l’endroit des acteurs de ce secteur et l’organisation en février dernier de la 44ème Assemblée Générale de la FANAF qui a permis de porter à la tête de cette institution panafricaine Monsieur César EKOMIE-AFENE qui n’est plus à présenter dans le secteur des assurances.
Je ressent toutefois une insatisfaction quant à la mise en place du Fonds de Garantie automobile qui n’a pas pu se concrétiser.
Le marché m’a renouvelée sa confiance par un second mandat le 14 juillet dernier. Pour ce mandat, cinq actions prioritaires ont été retenues : la création d’un Pool Transport Public et Voyage (PTV), la mise en place d’un fonds de garantie et d’indemnisation directe, l’assainissement du secteur, la digitalisation du secteur, le programme de développement du secteur des assurances (2020-2030). Ce Programme comporte trois axes stratégiques que sont: l’amélioration de la protection des citoyens, l’amélioration de la qualité des services et prestations fournies ainsi que la mise en place d’une politique de répartition des risques mesurés au sein du secteur.

Certains assureurs, notamment en Europe, plaident pour la mise en place d’un mécanisme de mutualisation (Etat-Assurances) afin de créer un « régime d’assurance pandémie » capable de répondre à une crise comme celle du Covid-19. Que pensez-vous de la mise en place d’un tel mécanisme dans le contexte africain ?

Nous sommes d’avis avec ces assureurs que la mise en place d’un tel mécanisme est nécessaire d’autant plus que nous l’avons suggéré.
Les assureurs seuls ne peuvent valablement pas faire face à une telle pandémie, donc il y a eu lieu de mettre en place un fonds, similaire à un fonds de catastrophes naturelles, pour faire face à ce type de pandémie à l’avenir pour ce qui est de la partie indemnisation.
En sus de ce fonds, les assureurs devront penser à l’accompagnement des clients, à travers la mise en place d’assurances permettant de faire face à la perte d’exploitation immatérielle surtout pour les PME-PMI qui constituent une grande partie de notre économie ; et qui malheureusement aujourd’hui payent le prix fort de cette pandémie car ayant fermé suite aux mesures gouvernementales.
L’accompagnement des assureurs à travers les produits d’assurances adaptés permettraient à ces entreprisses de reprendre leur activités.
En définitive, il faut créer un fonds de soutien dans lequel interviendront tous les acteurs économiques et adapter les produits d’assurances.

A la suite de cette épidémie, quels nouveaux produits adaptés à ces risques, les assureurs devront-ils demain proposer à leur clientèle ?

La situation actuelle inspire de créer des garanties de perte d’exploitation immatérielle qui permettraient aux PME PMI de reprendre leur activité et de constituer la relance de nos économies car la fermeture des entreprises signifie l’augmentation du chômage, diminution des recettes fiscales de l’État, les risques sociaux et la baisse corrélatives des primes d’assurances et de réassurances.
Particulièrement en Afrique, il faut assurer les catastrophes naturelles car nous assistons avec la fonte des glaciers à des phénomènes d’inondations, d’éboulements de terre etc. dans nos villes situées en zone côtière.
Dans les pays de la zone équatoriale avec la prépondérance des forêts, nous assistons à un phénomène de rencontre entre l’animal et l’homme. En effet, certaines espèces animales, dites protégées, sortent de la forêt et détruisent les plantations et mêmes les habitations des populations. Il convient aux assureurs de mettre en place « des contrats type homme-faune » incluant une garantie responsabilité civile pour les dégâts matérielles et corporelles.

Interview réalisée par A.C. DIALLO

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