L’Afrique est aujourd’hui considérée comme la dernière frontière de croissance économique, partagez vous cette affirmation ?
Non seulement il y’a la croissance en Afrique, il y a également les problèmes posés par la croissance, faiblement intensive en emploi et souvent fortement inégalitaire. Il ne va pas de soi que la croissance résolve tous les problèmes, elle peut même en créer certaines. Quand vous prenez la croissance économique, à aucun moment les observateurs ne sont prêts à dire qu’elle est satisfaisante, robuste, résiliente. Ce sont des qualificatifs que les historiens emploient à postériori. Aujourd’hui, on a en Afrique une croissance en pente ascendante. Bien sûr on peut noter des différences selon les pays, les régions et les périodes. C’est évident que quand le prix du baril de pétrole baisse de 50%, pour certains pays c’est une ressource, pour d’autres c’est une contrainte d’avoir à payer une facture pétrolière. Mais cela ne change rien à la pente.
Mais cette croissance est-elle, selon vous, durable ?
La réalité est que l’Afrique va avoir une croissance forte pendant 30 ans, voire plus.
Cette croissance à des raisons tellement profonde qu’elle est durable parce qu’elle est fondée sur la démographie et sur des mécanismes endogènes. Il faut oublier les vieilles idées selon lesquelles l’Afrique se développe à cause des matières premières. Cette idée est fausse. En réalité l’Afrique est un continent de l’économie tertiaire.
Il faut pour s’en convaincre, voir ce qui se passe actuellement dans les secteurs des Télécommunications, de la Logistique, du Commerce, du Transport…
La croissance africaine est complètement endogène. Il y’a eu un facteur qui a amélioré cette croissance, c’est le prix relatif des exportations. Mais la contribution des matières premières dans la croissance africaine est négative d’années en années, au sens où les matières premières baissent en prix. La croissance s’est donc faite malgré les matières premières. C’est la consommation de biens et de nouveaux services financiers, informatiques, de santé etc… ajoutée à l’investissement productif et à l’urbanisation qui sont les vraies raisons.
Quelles politiques publiques, les États africains doivent-ils mettre en place pour une meilleure distribution de cette croissance ?
Il y’a des pays qui ont mis en œuvre des politiques publiques remarquables.
Je pense notamment au Rwanda, pour ce qui concerne l’environnement des affaires et le développement des entreprises. C’est également le cas du Maroc et de l’Ile Maurice.
Ces pays font d’importants efforts pour convaincre les entreprises du secteur informel de rentrer dans le secteur formel en leur montrant que cela peut leur apporter beaucoup d’avantages et non beaucoup d’ennuis. Il faut également une politique de formation professionnelle efficace. Enfin il y’a la rêgle de Droit et les éléments de gouvernance. On ne peut pas créer un véritable Centre financier si l’on a pas une bonne gouvernance.
Le juge de Paix des politiques publiques sera le différentiel de croissance par rapport à la moyenne.
S.T